7B_482/2024 21.05.2024
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
7B_482/2024  
 
 
Arrêt du 21 mai 2024  
 
IIe Cour de droit pénal  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Abrecht, Président, 
Hurni et Hofmann. 
Greffier: M. Magnin. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Elie Bugnion, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public central du canton de Vaud, avenue de Longemalle 1, 1020 Renens VD. 
 
Objet 
Prolongation de la détention provisoire, 
 
recours contre l'arrêt rendu le 20 mars 2024 par la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud (220 - PE23.024468-SDE). 
 
 
Faits:  
 
A.  
 
A.a. Le 6 septembre 2023, le Ministère public du canton de Lucerne a ouvert une instruction pénale contre A.________ (ci-après: le prévenu), ressortissant étranger né en 2005, pour les infractions de vol, de dommages à la propriété et de violation de domicile. Il lui reproche d'avoir, entre le 9 juillet et le 6 septembre 2023, avec un voire plusieurs individus, participé à des cambriolages et à un vol par introduction clandestine dans plusieurs cantons suisses, principalement au préjudice de temples hindous. Le prévenu aurait rassemblé un butin de l'ordre de 145'000 fr. et causé des dommages pour plus de 18'000 fr.  
Le prévenu a été interpellé le 6 septembre 2023 dans le canton de Lucerne. Par ordonnances des 9 septembre et 7 décembre 2023, le Tribunal des mesures de contrainte du canton de Lucerne l'a placé en détention provisoire jusqu'au 4 mars 2024. 
Assisté d'un avocat et en présence d'un interprète, le prévenu a été entendu sur les faits qui lui étaient reprochés par les autorités lucernoises les 7 et 22 septembre, 19 octobre, 23 novembre et 11 décembre 2023. À ces occasions, il a admis avoir participé à six cambriolages, ainsi qu'à un vol par introduction clandestine. 
 
A.b. Le 22 février 2024, le Ministère public cantonal Strada du canton de Vaud (ci-après: le Ministère public) a repris l'instruction pénale dirigée contre le prévenu à la suite d'une procédure en fixation de for.  
Le lendemain, il a demandé la prolongation de la détention provisoire du prévenu au Tribunal des mesures de contrainte du canton de Vaud (ci-après: le TMC). Le 28 février 2024, le prévenu a conclu au rejet de cette demande, ainsi qu'à sa libération immédiate. Il a en outre requis la traduction en français du contenu essentiel des actes de procédure les plus importants. 
Par ordonnance du 4 mars 2024, le TMC a ordonné la prolongation de la détention provisoire du prévenu jusqu'au 3 juin 2024. Dans ses considérants, il a notamment indiqué qu'il n'entrait pas en matière sur la requête du prévenu tendant à obtenir la traduction sollicitée, au motif, en substance, que celui-ci avait parfaitement connaissance des faits qui lui étaient reprochés et des éléments permettant de l'incriminer, ainsi que des éléments dont le Ministère public se prévalait dans sa requête, qui étaient presque intégralement fondés sur le dossier lucernois. 
 
B.  
Par arrêt du 20 mars 2024, la Chambre pénale de recours du Tribunal cantonal vaudois a rejeté le recours formé par le prévenu contre l'ordonnance rendue le 4 mars 2024 par le TMC. 
 
C.  
Par acte du 26 avril 2024, A.________ (ci-après: le recourant) interjette un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre cet arrêt, en concluant à sa réforme en ce sens qu'il soit immédiatement libéré. À titre subsidiaire, il conclut à l'annulation de l'arrêt et au renvoi de la cause à l'autorité cantonale, subsidiairement au TMC, pour nouvelle décision. Il demande en outre l'assistance judiciaire. 
Invités à se déterminer, l'autorité précédente y a renoncé et le Ministère public a indiqué qu'il n'entendait pas déposer de déterminations. Le 15 mai 2024, le recourant a déposé une écriture. 
 
 
Considérant en droit:  
 
1.  
Le recours en matière pénale (art. 78 al. 1 LTF) est ouvert contre une décision relative à la détention provisoire ou pour des motifs de sûreté au sens des art. 212 ss CPP. En outre, l'arrêt entrepris, en tant que décision incidente, peut causer au recourant un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF. Pour le surplus, le recours a été formé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) contre une décision prise en dernière instance cantonale (art. 80 LTF), de sorte qu'il y a lieu d'entrer en matière. 
 
2.  
 
2.1. Le recourant invoque tout d'abord une violation de son droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.) et de l'art. 227 al. 2 et 3 CPP. Il reproche à la cour cantonale d'avoir retenu que le TMC avait répondu à ses griefs relatifs à la langue de la procédure. À cet égard, il soutient que la demande de prolongation de la détention provisoire adressée le 23 février 2024 par le Ministère public au TMC ne serait pas suffisamment motivée, en particulier parce que cette demande se fonderait sur - respectivement renverrait à - des demandes et ordonnances précédentes, ainsi que sur des pièces (notamment 374 pages), exclusivement rédigées en allemand, sans être traduites en français. Il ajoute que la motivation de cette demande serait lacunaire, parce qu'elle n'énumérerait - respectivement ne renverrait à - aucun fait concret rédigé dans la langue de la procédure principale, à savoir le français. Il en déduit que la demande du 23 février 2024 n'aurait pas été faite dans la langue de la procédure et contreviendrait notamment aux art. 67 CPP et 16 de la loi vaudoise du 19 mai 2009 d'introduction du Code de procédure pénale suisse (LVCPP/VD; BLV 312.01).  
Invoquant à nouveau son droit d'être entendu, ainsi qu'une violation de l'art. 68 al. 2 CPP, le recourant reproche ensuite à la cour cantonale d'avoir rejeté sa requête tendant à la traduction du contenu essentiel de actes de procédure sur lesquels se fonde la demande de prolongation de sa détention provisoire du 23 février 2024. À cet égard, il conteste le raisonnement de l'autorité cantonale selon lequel il ne pouvait pas raisonnablement prétendre qu'il n'aurait pas eu connaissance des faits qui lui étaient reprochés, parce qu'il était détenu en raison des mêmes faits depuis plusieurs mois et qu'il avait participé à tous les actes de procédure en étant assisté d'un interprète. Le recourant fait ainsi valoir qu'il n'aurait pas pu prendre connaissance, concrètement, dans la langue de la procédure, à tout le moins dans une langue qu'il comprend, de la motivation présentée au TMC, ni de se déterminer à son sujet. 
 
2.2.  
 
2.2.1. Le droit d'être entendu, garanti à l'art. 29 al. 2 Cst., comprend notamment le droit pour le justiciable de s'expliquer avant qu'une décision soit prise à son détriment, celui de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur le sort de la décision, celui de participer à l'administration des preuves, d'en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos (ATF 146 IV 218 consid. 3.1.1; 142 II 218 consid. 2.3). Il garantit en particulier le droit pour l'intéressé de prendre connaissance du dossier et de participer à l'administration des preuves essentielles ou, à tout le moins, de s'exprimer sur son résultat lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 136 V 117 consid. 4.2.2; arrêt 6B_895/2022 du 19 juin 2023 consid. 2.2.1 et les arrêts cités).  
Le droit d'être entendu, compris comme l'un des aspects de la notion générale de procès équitable, implique également, pour l'autorité, l'obligation de motiver sa décision, afin que le destinataire puisse la comprendre, l'attaquer utilement s'il y a lieu et afin que l'autorité de recours puisse exercer son contrôle. Le juge doit ainsi mentionner, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision (ATF 146 II 335 consid 5.1; 143 III 65 consid. 5.2; 139 IV 179 consid. 2.2), de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause (ATF 143 IV 40 consid. 3.4.3; 141 IV 249 consid. 1.3.1; 139 IV 179 consid. 2.2). Il n'a toutefois pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties, mais peut au contraire se limiter à l'examen de ceux qui lui paraissent pertinents et aux questions décisives pour l'issue du litige (ATF 147 IV 249 consid. 2.4; 142 II 154 consid. 4.2; 139 IV 179 consid. 2.2). La motivation peut d'ailleurs être implicite et résulter des différents considérants de la décision (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1). L'autorité qui ne traite pas un grief relevant de sa compétence, motivé de façon suffisante et pertinente pour l'issue du litige, commet un déni de justice formel proscrit par l'art. 29 al. 1 Cst. (ATF 142 II 154 consid. 4.2). Le renvoi à des précédentes décisions à titre de motivation, notamment pour les soupçons suffisants de culpabilité, est conforme à la jurisprudence en matière de prolongation de la détention provisoire (cf. ATF 123 I 31 consid. 2c; arrêt 7B_715/2023 du 13 novembre 2023 consid. 5.2). 
Selon la jurisprudence, la violation du droit d'être entendu peut être réparée lorsque la partie lésée a la possibilité de s'exprimer devant une autorité de recours jouissant d'un plein pouvoir d'examen. Toutefois, une telle réparation doit rester l'exception et n'est admissible, en principe, que dans l'hypothèse d'une atteinte qui n'est pas particulièrement grave aux droits procéduraux de la partie lésée. Cela étant, une réparation de la violation du droit d'être entendu peut également se justifier, même en présence d'un vice grave, lorsque le renvoi constituerait une vaine formalité et aboutirait à un allongement inutile de la procédure, ce qui serait incompatible avec l'intérêt de la partie concernée à ce que sa cause soit tranchée dans un délai raisonnable (ATF 142 II 218 consid. 2.8.1 et les arrêts cités; arrêt 6B_659/2022 du 17 mai 2023 consid. 3.2; voir aussi ATF 145 I 167 consid. 4.4 et les arrêts cités). Le droit d'être entendu n'est pas une fin en soi. Il constitue un moyen d'éviter qu'une procédure judiciaire débouche sur un jugement vicié en raison de la violation du droit des parties de participer à la procédure, notamment à l'administration des preuves. Lorsqu'on ne voit pas quelle influence la violation du droit d'être entendu a pu avoir sur la procédure, il n'y a pas lieu d'annuler la décision attaquée (ATF 143 IV 380 consid. 1.4.1; arrêt 7B_677/2023 du 24 novembre 2023 consid. 2.2 et l'arrêt cité). 
 
2.2.2. Selon l'art. 227 al. 2 CPP, le ministère public transmet au tribunal des mesures de contrainte la demande de prolongation écrite et motivée, au plus tard quatre jours avant la fin de la période de détention, et y joint les pièces essentielles du dossier. Cette disposition concrétise le droit d'être entendu garanti à l'art. 29 al. 2 Cst. et, en matière de détention, aux art. 5 par. 4 CEDH et 31 al. 2 Cst. Selon la jurisprudence, la personne concernée par une procédure de mise en détention doit pouvoir accéder aux éléments de preuve y relatifs, tels que les résultats de l'enquête de police et des autres mesures d'investigation, de manière à pouvoir contester efficacement la mesure de détention (cf. concernant les art. 224 al. 2 et 225 al. 2 CPP, ATF 125 I 394 consid. 5b; 115 Ia 293 consid. 4-6; arrêt 1B_593/2011 du 9 novembre 2011 consid. 2.1).  
 
2.2.3. L'art. 67 CPP prévoit que la Confédération et les cantons déterminent les langues dans lesquelles leurs autorités pénales conduisent les procédures (al. 1); les autorités pénales cantonales accomplissent tous les actes de procédure dans ces langues, la direction de la procédure pouvant autoriser des dérogations (al. 2). Selon l'art. 16 LVCPP, dans le canton de Vaud, la langue de la procédure est le français.  
 
2.2.4. L'art. 68 al. 2 CPP prévoit que le contenu essentiel des actes de procédure les plus importants est porté à la connaissance du prévenu oralement ou par écrit dans une langue qu'il comprend, même si celui-ci est assisté d'un défenseur (1 re phase); nul ne peut se prévaloir d'un droit à la traduction intégrale de tous les actes de procédure et des pièces du dossier (2 e phase). Cette disposition renvoie aux droits particuliers du prévenu, qui découlent pour l'essentiel des art. 32 al. 2 Cst., 6 par. 3 let. a et e CEDH, 14 par. 3 let. a et f du Pacte international du 16 décembre 1966 relatif aux droits civils et politiques [Pacte ONU II; RS 0.103.2], ainsi que de la pratique fondée sur ces dispositions. Ces articles garantissent au prévenu le droit d'obtenir gratuitement la traduction de toutes les pièces et déclarations qu'il lui faut comprendre pour assurer efficacement sa défense et bénéficier d'un procès équitable (ATF 143 IV 117 consid. 3.1). Il n'existe toutefois aucun droit d'obtenir la traduction intégrale du dossier, ainsi que des actes de procédure; s'agissant des ordonnances pénales, le dispositif et l'indication des voies de droit doivent être traduits. Le prévenu n'est pas non plus dispensé de signaler son besoin d'obtenir une traduction et/ou de s'enquérir du contenu d'une ordonnance (ATF 145 IV 197 consid. 1.3.3; arrêt 6B_1140/2020 du 2 juin 2021 consid. 1.1 et les arrêts cités). Le Tribunal fédéral examine le respect de cette obligation notamment sous l'angle du principe de la bonne foi (arrêt 6B_667/2017 du 15 décembre 2017 consid. 5.1 et 5.2), lequel concerne, en procédure pénale, non seulement les autorités mais aussi, le cas échéant, les différentes parties, y compris le prévenu (cf. art. 3 al. 2 let. a CPP; ATF 147 IV 274 consid. 1.10.1).  
 
2.3.  
 
2.3.1. En premier lieu, les juges cantonaux n'ont pas violé, comme paraît le leur reprocher le recourant, leur devoir de motivation. Ils ont en effet exposé le grief du recourant selon lequel le TMC n'aurait pas examiné son moyen relatif aux graves vices de procédure qu'il aurait soulevés, à savoir que le Ministère public n'aurait pas exposé, dans sa demande de prolongation de la détention provisoire du 23 février 2024, les faits confirmant la persistance du caractère sérieux et suffisant des charges retenues contre lui dans la langue de la procédure (cf. arrêt querellé, p. 5). En outre, ils ont mentionné que le recourant avait relevé que la demande de prolongation de sa détention n'aurait pas pu se fonder sur des renvois à différents actes de procédure effectués dans le canton de Lucerne et rédigés en allemand, laquelle se référait au surplus à un dossier de 374 pages (cf. arrêt querellé, p. 5). Ensuite, ils ont répondu à ce grief, en indiquant que le TMC avait, lui aussi, répondu aux moyens du recourant relatifs à la langue de la procédure, dans la mesure où il avait rejeté sa requête tendant à ce que le contenu des actes de procédure essentiels lui soient traduits, au motif qu'il avait, pour plusieurs raisons, parfaitement connaissance des faits qui lui étaient reprochés, ainsi que des éléments permettant de l'incriminer (arrêt querellé, p. 8). Cette argumentation est correcte, dans la mesure où le TMC a, dans son ordonnance du 4 mars 2024, indiqué pourquoi, selon lui, il n'y avait pas matière à donner suite à la requête du recourant tendant à ce que le contenu des pièces essentielles du dossier lui soit traduit et donc que la demande de prolongation était conforme à l'art. 227 al. 2 CPP (cf. dossier cantonal; ordonnance de prolongation de la détention provisoire du TMC du 4 mars 2024, p. 2). On ne discerne dès lors aucune violation du droit d'être entendu sur ce point, une telle violation ne pouvant au surplus être invoquée pour le seul fait que la motivation retenue ne soit pas celle attendue par le recourant.  
 
2.3.2. En deuxième lieu, la demande de prolongation de la détention provisoire du 23 février 2024 a été rédigée en français, à savoir dans la langue parlée par le recourant. Elle décrit le déroulement de la procédure, notamment en ce qui concerne la question du for, et, comme le relève la cour cantonale, énumère et résume les faits de manière suffisamment détaillée, puisqu'elle permet au recourant, ainsi qu'aux autorités, de comprendre que l'activité délictueuse de celui-ci porte sur un total de onze cas de cambriolages, commis entre le 9 juillet et le 6 septembre 2023 avec deux éventuels comparses, dans plusieurs cantons, dont le canton de Vaud et en Suisse allemande, au préjudice, principalement, de temples hindous. La demande précise également que le butin s'élève à plus 145'000 fr. et que les dommages causés se montent à plus de 18'000 francs. Elle indique également les infractions reprochées au recourant, usuelles en matière de cambriolage, à savoir le vol, ainsi que ses circonstances aggravantes (cf. art. 139 ch. 1 et 3 CP), le dommage à la propriété (cf. art. 144 al. 1 CP) et la violation de domicile (art. 186 CP; cf. art. 105 al. 2 LTF), infractions qui ressortent par ailleurs de la feuille de tête du dossier cantonal. De plus, la demande de prolongation relève que le recourant a été entendu sur ces faits, avec l'assistance d'un avocat et d'un interprète, les 7 et 22 septembre, 19 octobre, 23 novembre et 11 décembre 2023, mentionne quelles sont les investigations qui restent à effectuer et livre une motivation relative aux risques de fuite et de collusion invoqués, ainsi que concernant le principe de la proportionnalité.  
Dans sa demande de prolongation de la détention provisoire, le Ministère public a certes également renvoyé à différentes demandes et ordonnances adressées et rendues par les autorités lucernoises et a produit des pièces résultant du dossier alémanique, toutes rédigées en allemand. Cela étant, sur ce point, le raisonnement de la cour cantonale ne prête pas le flanc à la critique et doit être confirmé. S'il est exact que le recourant peut, en principe, demander la traduction des pièces essentielles du dossier dans une langue qu'il comprend conformément à l'art. 68 al. 2 CPP, il faut rappeler que l'application de cette disposition légale sert à permettre au prévenu d'assurer efficacement sa défense et à bénéficier d'un procès équitable. Or, dans le cadre de la présente demande de prolongation de la détention provisoire, on ne saurait admettre que le prévenu ne serait pas à même d'assurer efficacement sa défense ou que son droit à un procès équitable n'aurait pas été respecté parce que certains des documents qui constituent le dossier sont en allemand. Comme l'a relevé l'autorité cantonale, le recourant ne peut en effet pas raisonnablement prétendre qu'il n'aurait pas connaissance des faits qui lui sont reprochés par les autorités de poursuite pénale alémaniques et qui résultent des documents rédigés en allemand, ni d'ailleurs que l'instruction qui a été conduite par le Ministère public du canton de Lucerne se serait déroulée de manière inéquitable. En effet, selon les faits retenus, le recourant a été entendu à cinq reprises, assisté d'un avocat et d'un interprète, par les autorités de ce canton sur les faits et sur les éléments permettant de le mettre en cause. Par ailleurs, il a exécuté déjà plusieurs mois de détention provisoire en raison des mêmes faits, qu'il a d'ailleurs admis en bonne partie, à la suite des ordonnances rendues les 9 septembre et 7 décembre 2023, à savoir celles auxquelles le Ministère public a renvoyé dans sa demande de prolongation du 23 février 2024. À cet égard, il ne ressort pas de l'état de fait cantonal qu'il n'aurait pas pu prendre connaissance d'une partie des pièces du dossier alémanique à ces occasions ou qu'il aurait contesté, pour l'une ou l'autre raison, son placement en détention provisoire à ce moment-là. Le recourant n'indique en outre pas qu'il aurait requis, devant les autorités lucernoises, la traduction de certains actes de procédure ou invoqué un vice de procédure à cet égard. Dans ces circonstances, on ne peut que suivre la juridiction cantonale lorsqu'elle retient que les faits qui fondent la demande de prolongation du 23 février 2024 étaient déjà connus du recourant, qu'il n'y avait pas lieu de faire droit à la requête de celui-ci tendant à la traduction du contenu essentiel des actes de procédure fondant cette demande et que le TMC pouvait donc se fonder sur les pièces du dossier pénal lucernois. 
On précisera encore que la demande de prolongation effectue des renvois aux pièces pertinentes pour chacune de ses explications (art. 105 al. 2 LTF), de sorte que le grief du recourant selon lequel il ne pouvait pas, en trois jours, prendre connaissance des pièces pertinentes du dossier "prolixe" composé de "374 pages" et, partant relatif à son caractère volumineux, ne saurait être suivi. On peut enfin ajouter que le TMC a, dans son ordonnance du 4 mars 2024, décrit, en français, les pièces pertinentes permettant de détailler les faits reprochés au recourant (dossier cantonal; ordonnance de prolongation de la détention provisoire du TMC du 4 mars 2024, p. 3; cf. art. 105 al. 2 LTF), de sorte que toute éventuelle violation du droit d'être entendu sur ce point a de toute manière été réparée, dès lors que cette ordonnance a ensuite été contestée par un recours devant l'autorité cantonale, qui dispose d'un plein pouvoir d'examen en fait et en droit. 
Ainsi, les autorités de poursuite pénale vaudoises n'ont nullement violé l'art. 227 al. 2 et 3 CPP dans le cadre de la procédure ayant conduit à prolonger la détention provisoire du recourant du 4 mars au 3 juin 2024. 
 
2.3.3. En dernier lieu, force est de constater, au regard des explications qui précèdent, que la requête du recourant tendant à la traduction des pièces essentielles du dossier produites à l'appui de la demande de prolongation du 23 février 2024 et, qui plus est, sa conclusion tendant à sa libération de la détention provisoire pour ce seul motif, ne respectent pas le principe de la bonne foi en procédure. De plus, à l'instar du défenseur du recourant, le Ministère public et le TMC n'ont, eux aussi, eu qu'un bref laps de temps pour prendre connaissance des pièces rédigées en allemand, sans que cela paraisse avoir posé un problème particulier. Au lieu de se limiter à invoquer un prétendu vice de procédure, le recourant aurait bien plutôt, s'il l'estimait pertinent, dû se déterminer sur les conditions matérielles de la détention provisoire. Or il ne l'a pas fait et ne saurait aujourd'hui reprocher aux autorités de ne pas lui avoir laissé la possibilité de le faire. Il n'a par ailleurs soulevé aucun grief contre la motivation cantonale relative aux art. 212 al. 3, 221 al. 1 et 237 CPP. Enfin, on relève que la déroulement de la procédure ne traduit aucune violation de l'art. 67 al. 2 CPP, dès lors que la procédure qui s'est déroulée sur le sol alémanique a été conduite en allemand et celle dans le canton de Vaud en français.  
 
3.  
En définitive, le recours doit être rejeté. 
Le recourant a demandé l'octroi de l'assistance judiciaire (cf. art. 64 al. 1 LTF). Son recours était cependant d'emblée dénué de chances de succès et cette requête doit être rejetée. Le recourant, qui succombe, supportera donc les frais judiciaires; ceux-ci seront toutefois fixés en tenant compte de sa situation financière, laquelle n'apparaît pas favorable (art. 65 al. 2 et 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer de dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
La requête d'assistance judiciaire est rejetée. 
 
3.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'200 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué au recourant, au Ministère public central du canton de Vaud, à la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud, au Tribunal des mesures de contrainte du canton de Vaud et au Ministère public cantonal Strada du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 21 mai 2024 
 
Au nom de la IIe Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président: Abrecht 
 
Le Greffier: Magnin