9C_68/2024 12.04.2024
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
9C_68/2024  
 
 
Arrêt du 12 avril 2024  
 
IIIe Cour de droit public  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Parrino, Président, Moser-Szeless et Beusch. 
Greffier : M. Bürgisser. 
 
Participants à la procédure 
A.________ SA, 
représentée par Me Jean-Emmanuel Rossel, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
Administration cantonale des impôts du canton de Vaud, 
route de Berne 46, 1014 Lausanne, 
intimée. 
 
Objet 
Impôts cantonaux et communaux du canton de Vaud et impôt fédéral direct, périodes fiscales 2008 à 2011, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 12 décembre 2023 (FI.2023.0138). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. A.________ SA (ci-après: la société ou la contribuable) a son siège dans le canton de Vaud. Elle a pour but (...).  
 
A.b. Par décision du 12 novembre 2019, l'Administration cantonale des impôts du canton de Vaud (ci-après: l'Administration fiscale) a notamment procédé à la taxation de la société pour l'impôt fédéral direct (ci-après: IFD) et les impôts cantonaux et communaux (ci-après: ICC) des années 2010 et 2011. Elle a également prononcé un rappel d'impôt pour les années 2004 à 2009. Par décision sur réclamation du 12 mai 2020, l'Administration fiscale a partiellement admis la réclamation de la société, au motif que la prescription du droit de procéder au rappel d'impôt de la période fiscale 2004 était acquise. Le 31 décembre 2020, la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après: le Tribunal cantonal) a rejeté le recours de la société et a confirmé la décision sur réclamation de l'Administration fiscale du 12 mai 2020 (ch. I et II du dispositif de l'arrêt FI.2020.0058). Par arrêt 2C_116/2021 du 8 juillet 2021, le Tribunal fédéral a partiellement admis le recours, en ce qui concerne l'IFD et les ICC 2005 à 2009 ainsi que l'infraction de tentative de soustraction des périodes fiscales 2010 et 2011; il a renvoyé la cause au Tribunal cantonal pour nouvelle décision dans le sens des considérants (ch. 1 et 2 du dispositif).  
 
A.c. A la suite de cet arrêt, le Tribunal cantonal a statué à nouveau le 22 décembre 2021. Il a partiellement admis le recours de la société et a annulé la décision sur réclamation de l'Administration fiscale du 12 mai 2020 portant sur l'IFD et les ICC 2006 à 2009, dans la mesure où elle a prononcé un rappel d'impôt pour ces périodes fiscales (ch. I et II du dispositif de l'arrêt FI.2021.0082); il a confirmé la décision pour le surplus.  
Par arrêt du 25 novembre 2022 (causes jointes 2C_81/2022 et 2C_102/2022), le Tribunal fédéral a rejeté le recours de la société et admis celui de l'Administration fiscale en tant qu'il concernait l'IFD et les ICC. Il a annulé l'arrêt cantonal du 22 décembre 2021 dans la mesure où il portait, tant pour l'IFD que les ICC, sur le rappel d'impôt des périodes 2007 à 2009 et a confirmé la décision sur réclamation de l'Administration fiscale du 12 mai 2020 en tant qu'elle portait sur le rappel d'impôt 2007 à 2009 (ch. 4 et 5 du dispositif de l'arrêt 2C_81/2022 et 2C_102/2022). 
 
A.d. Le 12 juin 2023, l'Office d'impôt des personnes morales du canton de Vaud (ci-après: l'office d'impôt) a rendu des "décisions de taxation et calcul de l'impôt résultant d'un réexamen (après retrait ou après une décision finale entrée en force) " concernant la société pour l'IFD et les ICC des années 2008 à 2011, ainsi que des prononcés d'amende IFD et ICC relatifs aux périodes fiscales 2010 et 2011.  
Par décision sur réclamation du 26 septembre 2023, l'Administration fiscale a rejeté la réclamation formée par la contribuable à l'encontre de ces décisions. 
 
B.  
Par arrêt du 12 décembre 2023, le Tribunal cantonal a rejeté le recours de la société et a confirmé la décision sur réclamation de l'Administration fiscale du 26 septembre 2023. 
 
C.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public et par un "recours en matière constitutionnelle subsidiaire", A.________ SA conclut à l'annulation de l'arrêt cantonal du "12 décembre 2024" [recte: 12 décembre 2023], ainsi qu'à l'annulation de la décision sur réclamation de l'Administration fiscale du 26 septembre 2023. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
 
1.1. L'arrêt attaqué a été rendu en dernière instance cantonale par un tribunal supérieur (art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF), dans une cause de droit public (art. 82 let. a LTF) qui ne tombe pas sous le coup des exceptions de l'art. 83 LTF. La voie du recours en matière de droit public est donc ouverte (cf. aussi art. 146 LIFD [RS 642.11] et 73 al. 1 de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes [LHID; RS 642.14]). Il s'ensuit que le recours constitutionnel subsidiaire est irrecevable (art. 113 LTF a contrario).  
 
1.2. L'instance précédente a traité dans un seul arrêt de l'IFD et des ICC, ce qui est admissible (ATF 135 II 260 consid. 1.3.1). Partant, le dépôt d'un seul acte de recours est aussi autorisé, dans la mesure où la partie recourante s'en prend aux deux catégories d'impôts (cf. ATF 135 II 260 consid. 1.3.2), certes de manière implicite en l'espèce. Il y a donc lieu d'entrer en matière, sous réserve de ce qui suit.  
 
1.3. La conclusion de la recourante relative à la décision sur réclamation du 26 septembre 2023 est irrecevable, en raison de l'effet dévolutif complet du recours auprès du Tribunal cantonal (cf. ATF 136 II 539 consid. 1.2; arrêt 9C_582/2023 du 6 décembre 2023 consid. 1.3). Compte tenu de l'issue du litige, la recevabilité des conclusions du recours qui sont de nature exclusivement cassatoire (cf. ATF 137 II 313 consid. 1.3 et les références) n'a pas être examinée plus avant.  
 
2.  
 
2.1. D'après l'art. 106 al. 1 LTF, le Tribunal fédéral applique le droit d'office. En vertu de l'art. 106 al. 2 LTF, le Tribunal fédéral ne connaît de la violation des droits fondamentaux que si ce moyen est invoqué et motivé par la partie recourante, c'est-à-dire s'il a été expressément soulevé et exposé de manière claire et détaillée (ATF 147 IV 453 consid. 1; 143 IV 500 consid. 1.1).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF. La partie recourante ne peut critiquer les constatations de fait ressortant de la décision attaquée que si celles-ci ont été effectuées en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF ou de manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire, et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF; ATF 145 V 188 consid. 2; 142 II 355 consid. 6). Conformément à l'art. 106 al. 2 LTF, la partie recourante doit expliquer de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées. A défaut, il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait divergeant de celui qui est contenu dans l'acte attaqué. En particulier, le Tribunal fédéral n'entre pas en matière sur les critiques appellatoires portant sur l'état de fait ou l'appréciation des preuves (cf. ATF 147 IV 73 consid. 4.1.2; 140 III 264 consid. 2.3; 137 II 353 consid. 5.1).  
 
3.  
Le litige porte sur la conformité au droit du calcul de l'impôt, des amendes et des intérêts tel qu'il a été effectué par l'office d'impôt et confirmé par le Tribunal cantonal. 
 
4.  
La contribuable reproche à la cour cantonale une violation de l'art. 29 al. 2 Cst., en ce que l'Administration fiscale aurait rendu sa décision sur réclamation sans qu'elle n'ait été "interpellée" et sans qu'aucune "séance" ne soit fixée. Elle fait de plus valoir qu'elle aurait "toujours demandé à être entendue oralement". 
 
4.1. On rappellera que le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 Cst. comprend notamment le droit pour l'intéressé de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, d'avoir accès au dossier, de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (cf. ATF 145 I 167 consid. 4.1 et les références).  
 
4.2.  
 
4.2.1. En ce qui concerne en premier lieu la demande d'audition orale invoquée par la recourante, la juridiction cantonale a constaté que la société n'avait pas expressément demandé à être entendue oralement par l'autorité intimée, si bien qu'elle ne pouvait se prévaloir d'une violation à être entendue oralement que lui conférait l'art. 188 al. 1 de la loi vaudoise du 4 juillet 2000 sur les impôts directs cantonaux (LI; rs/VD 642.11). En se limitant sur ce point à alléguer qu'elle aurait demandé à être entendue oralement, la recourante ne soutient pas ni ne démontre que le Tribunal cantonal aurait procédé à une constatation manifestement inexacte des faits (supra consid. 2.2). Le reproche de la recourante tombe dès lors à faux  
 
4.2.2. En ce qui concerne ensuite la prétendue absence d'"interpellation" en procédure de réclamation, il suffit de renvoyer aux constatations et à la motivation développée par les juges cantonaux, qui ne prêtent pas le flanc à la critique (cf. art. 109 al. 3 LTF). En bref, selon celles-ci, la recourante avait été expressément invitée par l'intimée à se déterminer sur la base d'une prise de position détaillée avant que la décision sur réclamation ne fût rendue, ce qui était suffisant pour garantir l'exercice du droit d'être entendu. Le grief doit être écarté.  
 
5.  
 
5.1. La cour cantonale a ensuite considéré que la recourante ne pouvait pas remettre en cause le résultat de la taxation (en lien avec les périodes fiscales litigieuses), qui était devenu définitif suite à l'arrêt du Tribunal fédéral 2C_81/2022 et 2C_102/2022 du 25 novembre 2022. Partant, seuls les griefs relatifs aux divers calculs étaient recevables. Or il n'était pas contesté que la contribuable ne s'était que partiellement acquittée des montants d'impôt dus sur le plan cantonal au terme d'échéance de sorte que des intérêts moratoires étaient dus. Pour le surplus, la société ne contestait pas les calculs de l'autorité de taxation, qui pouvaient être confirmés.  
 
5.2. Sur le fond, la recourante allègue que les arrêts du Tribunal fédéral 2C_116/2021 du 8 juillet 2021, ainsi que 2C_81/2022 et 2C_102/2022 du 25 novembre 2022prononcés à son encontre seraient contradictoires. Il en découlerait que les calculs opérés par l'office d'impôt seraient "inexacts sur la base du premier arrêt du Tribunal fédéral du 8 juillet 2021"; la recourante demande dès lors que le "Tribunal fédéral lui indique quelle est la bonne jurisprudence", et une "fois le droit connu sur ce point, [l]es calculs pourront être établis de manière définitive".  
 
5.3. Bien que la recevabilité de cette argumentation soit douteuse en tant qu'elle ne s'en prend pas à l'arrêt attaqué (cf. ATF 145 V 161 consid. 5.2; arrêt 9C_582/2023 du 6 décembre 2023 consid. 8.2.3), elle doit de toute manière être écartée. En premier lieu, sous couvert de demander un nouveau calcul, la recourante s'en prend en réalité au bien-fondé de la taxation, des rappels d'impôt et des amendes prononcés. Or comme l'a relevé à juste la juridiction cantonale, les décisions y relatives sont entrées en force avec le prononcé de l'arrêt du Tribunal fédéral 2C_81/2022 et 2C_102/2022 du 25 novembre 2022 (cf. art. 61 LTF). En second lieu, le Tribunal fédéral a déjà jugé, dans un arrêt relatif à un litige entre l'intimée et l'actionnaire de la société ainsi que son épouse, qu'il n'existait aucune contradiction entre les deux arrêts précités: par son arrêt 2C_116/2021 du 8 juillet 2021, le Tribunal fédéral a renvoyé la cause au Tribunal cantonal pour examen des conditions relatives au rappel d'impôt alors que dans son deuxième arrêt (2C_81/2022 et 2C_102/2022 du 25 novembre 2022), il a considéré que ces conditions, pour les années 2008 et 2009, étaient réalisées (arrêt 9C_582/2023 du 6 décembre 2023 consid. 6). Quoi qu'en dise la recourante, qui ne "comprend" notamment pas comment ces "deux arrêts ont jugé exactement le même dossier à une année et quatre mois et demi d'intervalle, sans qu'il n'y ait eu entre les deux arrêts aucune instruction complémentaire", il n'y a pas lieu de revenir sur ces aspects qui ont été clairement explicités dans l'arrêt 9C_582/2023 du 6 décembre 2023. Pour le surplus, on renverra (cf. art. 109 al. 3 LTF) à la motivation de l'arrêt cantonal au sujet de la confirmation des divers calculs effectués par l'office d'impôt, la recourante ne présentant à cet égard aucun grief pertinent.  
 
6.  
Il résulte de ce qui précède que le recours en matière de droit public est rejeté en application de la procédure simplifiée de l'art. 109 al. 2 let. a LTF, tant en matière d'IFD que d'ICC pour les années 2008 à 2011. Succombant, la recourante doit supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens (art. 68 al. 1 et 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours constitutionnel subsidiaire est irrecevable. 
 
2.  
Le recours en matière de droit public est rejeté, dans la mesure où il est recevable, en tant qu'il concerne l'IFD des périodes 2008 à 2011. 
 
3.  
Le recours en matière de droit public est rejeté, dans la mesure où il est recevable, en tant qu'il concerne les ICC des périodes 2008 à 2011. 
 
4.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
5.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public, et à l'Administration fédérale des contributions. 
 
 
Lucerne, le 12 avril 2024 
 
Au nom de la IIIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Parrino 
 
Le Greffier : Bürgisser