8C_694/2023 12.06.2024
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
8C_694/2023  
 
 
Arrêt du 12 juin 2024  
 
IVe Cour de droit public  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Wirthlin, Président, Heine et Métral. 
Greffière : Mme Betschart. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représentée par Me Michel De Palma, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
Office cantonal AI du Valais, 
avenue de la Gare 15, 1950 Sion, 
intimé. 
 
Objet 
Assurance-invalidité (revenu d'invalidité), 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du Valais du 27 septembre 2023 (S1 21 42). 
 
 
Faits :  
 
A.  
A.________, née en 1984, titulaire d'un CFC d'employée de commerce, a travaillé en dernier lieu en tant que comptable au service de B.________ SA à U.________ de 2010 à 2013. Le 5 juin 2014, elle a déposé une demande de prestations de l'assurance-invalidité en raison de troubles psychiques. L'Office cantonal AI du Valais (ci-après l'OAI) l'a mise au bénéfice de mesures de reclassement professionnel, qui ont finalement échoué. Dès décembre 2018, l'assurée travaille comme professeur de ski à 50 % pour l'École C.________ de U.________ pendant la saison hivernale et comme vendeuse à 50 % dans un magasin de golf à V.________ pendant la saison estivale (du 1er mai au 31 octobre). 
Dans un rapport du 16 août 2019, le docteur D.________, psychiatre traitant de l'assurée, a retenu les diagnostics de trouble dépressif moyen, épisode actuel moyen, avec syndrome somatique (F33.11) et de personnalité anankastique (F60.5). Ont également été évoqués, sans répercussions sur la capacité de travail, un trouble de l'alimentation en rémission (F50.9) et un trouble psychotique aigu polymorphe, sans symptômes schizophréniques, sous traitement de Ritaline (F23.0). Il a estimé que sa patiente était en mesure de travailler quatre heures par jour dans une activité à horaires réguliers, avec un niveau moyen de responsabilités et un faible niveau de stress. Le service de réadaptation de l'OAI a observé, dans un rapport du 14 novembre 2019, qu'il ne fallait pas mettre en péril les activités professionnelles de vendeuse et de professeur de ski, trouvées par l'assurée elle-même, et lui laisser conserver cet équilibre qu'elle avait réussi à mettre en place. Dans une prise de position du 7 avril 2020, le Service médical régional de l'assurance-invalidité (SMR) a confirmé une capacité de travail de quatre heures par jour en tenant compte des limitations fonctionnelles décrites par le docteur D.________. 
Sur cette base, l'OAI a, par décision du 7 janvier 2021, octroyé à l'assurée un trois-quarts de rente d'invalidité dès le 1er décembre 2014, sous déduction des indemnités journalières perçues durant les périodes de reclassement intervenues de 2015 à 2018. 
 
B.  
Par arrêt du 27 septembre 2023, la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du Valais a rejeté le recours formé par A.________ contre cette décision. 
 
C.  
A.________ interjette un recours en matière de droit public contre cet arrêt. Elle conclut à sa réforme en ce sens qu'elle soit mise au bénéfice d'une rente d'invalidité entière dès le 1er décembre 2014. 
L'OAI conclut au rejet du recours. Le Tribunal cantonal et l'Office fédéral des assurances sociales ont renoncé à se déterminer. 
A.________ s'est déterminée par acte du 26 février 2024, en maintenant ses conclusions. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recours est dirigé contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu en matière de droit public (art. 82 ss LTF) par une autorité cantonale de dernière instance (art. 86 al. 1 let. d LTF). Il a été déposé dans le délai (art. 100 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi. Il est donc recevable. 
 
2.  
Le recours en matière de droit public peut être formé pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il n'examine en principe que les griefs invoqués, compte tenu de l'exigence de motivation prévue à l'art. 42 al. 2 LTF, et statue par ailleurs sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sauf s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). Le recourant qui entend s'en écarter doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions de l'art. 105 al. 2 LTF sont réalisées. 
 
3.  
L'arrêt attaqué expose de manière correcte les dispositions légales et principes jurisprudentiels applicables en l'espèce, notamment en ce qui concerne l'évaluation du taux d'invalidité (cf. art. 16 LPGA) et du revenu d'invalide dans les cas où l'assuré exerce une activité professionnelle après la survenance de l'atteinte à la santé (cf. ATF 139 V 592 consid. 2.3; 135 V 297 consid. 5.2). Il suffit d'y renvoyer. 
 
4.  
 
4.1. Afin de déterminer le revenu avec invalidité, l'intimé a tenu compte d'une part du salaire de 15'000 fr. que la recourante a réalisé dans l'activité de vendeuse pendant les six mois de la saison estivale. Pour les autres six mois, il a considéré qu'en exerçant l'activité de professeur de ski pendant environ cinq mois, la recourante n'avait pas repris une activité que l'on pouvait raisonnablement attendre d'elle. Il faillait donc appliquer les salaires statistiques ressortant de l'Enquête suisse sur la structure des salaires (ESS), ce qui menait à un revenu de 13'738 fr. 65. Le revenu d'invalide s'élevait ainsi à 28'738 fr. 65 au total. Comparé au revenu sans invalidité de 85'650 fr. 95 (non litigieux en l'espèce), le taux d'invalidité était de 67 % (arrondi) et ouvrait le droit à un trois quarts de rente d'invalidité.  
 
4.2. Dans la procédure devant le tribunal cantonal, la recourante a soutenu qu'il fallait appliquer le revenu de 24'147 fr. qu'elle avait réellement obtenu, notamment pour l'activité de professeur de ski (soit 9147 fr., en sus des 15'000 fr. pour l'activité de vendeuse sur six mois). Cependant, les premiers juges ont constaté que les montants bruts perçus dans l'activité de professeur de ski en 2019 avaient atteint 12'645 fr. 75 (janvier: 2346 fr. 50, février: 3186 fr. 50, mars: 2705 fr. 25, avril: 1775 fr., et décembre: 2632 fr. 50). Ils ont considéré qu'il ne faillait pas tenir compte du montant de 24'147 fr. que la recourante souhaiterait retenir comme revenu d'invalide pour l'année 2019, mais de la somme de 27'645 fr. 75. La recourante avait en effet utilisé un montant net dans son calcul, soit celui qui ressortait de sa déclaration d'impôt, et non pas un montant brut. Or, dans la mesure où le revenu sans invalidité de 85'650 fr. 95 était un montant brut, il convenait également de prendre en compte le revenu brut d'invalide. La solution retenue par l'intimé, à savoir faire abstraction du salaire de professeur de ski pour la période de novembre à avril et fixer le revenu d'invalide au moyen des données statistiques de l'ESS, soit 13'738 fr. 65, aboutissait à un revenu annuel avec invalidité de 28'738 fr. 65, et à un taux d'invalidité 66,45 %, ouvrant ainsi le droit à un trois quarts de rente. En prenant en compte le salaire (brut) réellement perçu par la recourante, le total de son revenu annuel 2019 était de 27'645 fr. 75. Dans ce cas, le taux d'invalidité était de 67,72 %. Par conséquent, que l'on prenne en compte le salaire effectivement réalisé par la recourante (vendeuse + professeur de ski) ou celui déterminé par l'OAI (vendeuse + salaire ESS), le taux d'invalidité obtenu ouvrait dans les deux cas un droit à un trois quarts de rente et ne dépassait pas le seuil de 70 % prévu pour l'octroi d'une rente entière. Dès lors, la question de savoir si l'activité de professeur de ski, exercée de décembre à avril, mettait pleinement en valeur la capacité de gain de la recourante pendant la période durant laquelle elle n'exerçait pas son emploi de vendeuse pouvait être laissée ouverte, le résultat obtenu étant identique.  
 
4.3.  
 
4.3.1. Pour l'essentiel, la recourante se borne à répéter que le recours aux données ressortant de l'ESS ne serait pas admissible en l'occurrence, vu que l'activité de professeur de ski serait parfaitement adaptée à ses limitations fonctionnelles. Or, dans sa détermination du 26 février 2024, elle concède elle-même que ce sont les montants bruts qui doivent être pris en compte et non pas les montants nets ressortant de sa déclaration d'impôts. Au surplus, les juges cantonaux ont démontré qu'en l'espèce les deux manières de procéder pour déterminer le revenu d'invalidité aboutissent à des taux d'invalidité pratiquement identiques et n'ont aucune influence sur la quotité de la rente. Par conséquent, on ne peut pas leur reprocher d'avoir laissé ouverte la question de savoir si la recourante mettait pleinement en valeur sa capacité de gain résiduelle en exerçant le métier de professeur de ski pendant la saison hivernale. Par ailleurs, c'est à juste titre que les premiers juges ont tenu compte du revenu perçu durant le mois de décembre 2019 dans cette activité, dès lors qu'il fait parti du revenu figurant dans la déclaration d'impôts pour la période 2019, que les salaires étaient versés mensuellement, et que le salaire de décembre 2018 avait été exclu du calcul. La recourante ne démontre donc nullement en quoi les constatations et conclusions des premiers juges seraient contraires au droit fédéral voire arbitraires. Sa référence à l'ATF 138 V 106 est dépourvue de pertinence. En effet, cet arrêt ne porte pas sur l'établissement du revenu hypothétique sans invalidité après la survenance d'une atteinte à la santé, mais sur le calcul du gain assuré en assurance-accidents, en application de l'art. 22 OLAA, compte tenu du revenu réalisé avant l'accident assuré.  
 
4.3.2. La recourante allègue enfin que son état de santé se serait péjoré depuis la décision du 7 janvier 2021 et qu'elle ne pourrait désormais exercer une activité professionnelle qu'à 30 ou 40 %. Toutefois, elle n'a jamais invoqué une telle péjoration devant l'instance cantonale. Il s'agit ainsi d'un fait nouveau postérieur à la décision contestée et qui était donc soustrait au pouvoir d'examen des premiers juges (cf. ATF 144 V 210 consid. 4.3.1; 132 V 215 consid. 3.1.1). Il appartient à la recourante d'adresser une demande de révision à l'intimé si elle estime que ce fait nouveau justifie une telle démarche.  
 
5.  
Infondé, le recours doit être rejeté. La recourante, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal du Valais, Cour des assurances sociales, et à l'Office fédéral des assurances sociales. 
 
 
Lucerne, le 12 juin 2024 
 
Au nom de la IVe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Wirthlin 
 
La Greffière : Betschart