7B_545/2024 31.05.2024
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
7B_545/2024  
 
 
Arrêt du 31 mai 2024  
 
IIe Cour de droit pénal  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Abrecht, Président, 
Kölz et Hofmann. 
Greffière : Mme Paris. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Philippe Girod, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public de la Confédération, 
Guisanplatz 1, 3003 Berne. 
 
Objet 
Prolongation de la détention provisoire, 
 
recours contre la décision du Tribunal pénal fédéral, Cour des plaintes, du 15 avril 2024 (BH.2024.4). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Le 28 juillet 2021, B.________ (ci-après: le plaignant) et C.________ (ci-après: la plaignante) ont porté plainte contre A.________ (ci-après: A.________). Le premier l'a fait en raison de faits survenus le 27 juillet 2021 à U.________: A.________ lui aurait asséné un coup de poing derrière la tête, le blessant; le plaignant serait tombé au sol puis aurait chuté dans les escaliers sous la force du coup; A.________ l'aurait également menacé en lui disant "la prochaine fois, je vous tue, comme les autres". La plainte de la seconde porte sur des faits survenus à V.________, à des dates indéterminées entre 2011 et mai 2021: à plusieurs reprises, alors qu'il la frappait régulièrement, le prénommé l'aurait contrainte à entretenir avec lui des relations sexuelles qu'elle ne voulait pas, sans qu'elle s'y opposât, de crainte qu'il la frappe à nouveau. Il est aussi reproché à A.________ d'avoir infligé des violences psychologiques, physiques et à caractère sexuel à D.________ (ci-après: D.________) au cours de la relation qu'il entretenait avec elle. 
 
B.  
 
B.a. A.________ a été arrêté le 17 décembre 2021. Le lendemain, le Ministère public de la République et canton de Genève (ci-après: le MP-GE) a ouvert une enquête contre lui des chefs notamment de lésions corporelles simples (art. 123 CP), menaces (art. 180 CP) et viol (art. 190 CP).  
Par ordonnance du 19 décembre 2021, le Tribunal des mesures de contrainte de la République et canton de Genève (ci-après: le TMC-GE) a ordonné la détention provisoire de A.________ pour une durée de trois mois, en raison des risques de fuite, de collusion et de réitération qu'il présentait. 
 
B.b. Le 18 janvier 2022, le Ministère public de la Confédération (ci-après: le MPC), qui avait déjà ouvert une instruction pénale en 1995 contre le prévenu du chef de meurtre (art. 111 CP), subsidiairement d'assassinat (art. 112 CP), a repris la procédure ouverte par le Ministère public genevois. Dans le cadre de la procédure menée par le MPC, A.________ avait été arrêté le 30 octobre 2018 et placé en détention provisoire le 1er novembre 2018 pour une durée de trois mois, plusieurs fois prolongée et confirmée par la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral (ci-après: le TPF), puis par le Tribunal fédéral. A la suite de l'admission de son ultime recours par le Tribunal fédéral, le recourant avait été remis en liberté le 19 mai 2020 (arrêt 1B_195/2020 du 18 mai 2020). Ce dernier arrêt relevait que les faits reprochés au prénommé et commis - à titre d'auteur principal ou accessoire - en 1995 étaient prescrits s'ils n'étaient pas qualifiés d'assassinat. Cet arrêt avait aussi mis en évidence l'absence d'avancement de l'enquête.  
 
B.c. A la suite de la reprise par le MPC de la procédure ouverte par le MP-GE, le Tribunal des mesures de contrainte du canton de Berne (ci-après: le TMC-BE) a régulièrement prolongé la détention provisoire pour une durée de trois mois, par des décisions qui ont été confirmées en dernière instance par le Tribunal fédéral (arrêts 1B_99/2023 du 7 mars 2023; 7B_411/2023 du 6 septembre 2023; 7B_885/2023 du 4 décembre 2023).  
La dernière demande de prolongation de la détention provisoire déposée par le MPC date du 12 mars 2024. Par ordonnance du 20 mars 2024, le TMC-BE y a fait droit, en la prolongeant jusqu'au 17 juin 2024. Par décision du 15 avril 2024, le TPF a rejeté le recours déposé par A.________ contre cette ordonnance. En substance, il a considéré que les charges demeuraient suffisantes, que des risques de fuite et de collusion existaient et que le principe de la proportionnalité était respecté. 
 
C.  
A.________ interjette un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre la décision du 15 avril 2024, en concluant à sa réforme dans le sens du refus de la demande de prolongation de sa détention formée par le MPC et de sa libération immédiate. Subsidiairement, il requiert l'annulation de la décision attaquée et le renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Il sollicite par ailleurs le bénéfice de l'assistance judiciaire. 
Invité à se déterminer, le TPF a renoncé à formuler des observations, persistant dans les termes de sa décision. Quant au MPC, qui se réfère pour l'essentiel aux décisions précédentes, il conclut au rejet du recours. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recours en matière pénale est recevable contre les décisions prises par la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral qui portent sur des mesures de contrainte au sens des art. 196 ss CPP, dont font partie les décisions relatives à la détention provisoire ou pour des motifs de sûreté (art. 78 ss LTF; ATF 143 IV 85 consid. 1.2). Selon l'art. 81 al. 1 let. a et b ch. 1 LTF, le recourant, prévenu détenu, a qualité pour recourir. Les autres conditions de recevabilité étant réunies, il y a lieu d'entrer en matière. 
 
2.  
 
2.1. Le recourant ne remet pas en cause les risques de fuite et de collusion retenus par les autorités précédentes. Il se plaint en revanche d'arbitraire et d'une violation du droit fédéral en tant que l'autorité précédente a retenu qu'il existait toujours de sérieux soupçons de culpabilité à son endroit justifiant la prolongation de la détention provisoire.  
 
2.2.  
 
2.2.1. Le Tribunal fédéral n'est pas une autorité d'appel, auprès de laquelle les faits pourraient être rediscutés librement. Il est lié par les constatations de fait de la décision entreprise (art. 105 al. 1 LTF), à moins qu'elles aient été établies en violation du droit ou de manière manifestement inexacte au sens des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, soit pour l'essentiel de façon arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il n'y a arbitraire que lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables. Le Tribunal fédéral n'entre en matière sur les moyens fondés sur la violation de droits fondamentaux, dont l'interdiction de l'arbitraire, que s'ils ont été invoqués et motivés de manière précise (art. 106 al. 2 LTF; ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1; 143 IV 500 consid. 1.1). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1; 145 IV 154 consid. 1.1).  
 
2.2.2. Une mesure de détention provisoire ou pour des motifs de sûreté n'est compatible avec la liberté personnelle (art. 10 al. 2 Cst. et 5 CEDH) que si elle repose sur une base légale (art. 31 al. 1 et 36 al. 1 Cst.), soit en l'espèce l'art. 221 CPP. Elle doit en outre correspondre à un intérêt public et respecter le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 2 et 3 Cst.; art. 212 al. 3 et 237 al. 1 CPP). Pour que tel soit le cas, la privation de liberté doit être justifiée par un risque de fuite ou par un danger de collusion ou de réitération (cf. art. 221 al. 1 let. a, b et c CPP). Préalablement à ces conditions, il doit exister des charges suffisantes, soit de sérieux soupçons de culpabilité, à l'égard de l'intéressé (art. 221 al. 1 CPP), c'est-à-dire des raisons plausibles de le soupçonner d'avoir commis une infraction.  
Selon la jurisprudence, il n'appartient pas au juge de la détention de procéder à une pesée complète des éléments à charge et à décharge et d'apprécier la crédibilité des personnes qui mettent en cause le prévenu. Il doit uniquement examiner s'il existe des indices sérieux de culpabilité justifiant une telle mesure. L'intensité des charges propres à motiver un maintien en détention préventive n'est pas la même aux divers stades de l'instruction pénale; si des soupçons, même encore peu précis, peuvent être suffisants dans les premiers temps de l'enquête, la perspective d'une condamnation doit apparaître avec une certaine vraisemblance après l'accomplissement des actes d'instruction envisageables (ATF 143 IV 330 consid. 2.1; 143 IV 316 consid. 3.1 et 3.2). 
En d'autres termes, les soupçons doivent se renforcer plus l'instruction avance et plus l'issue du jugement au fond approche. Si des raisons plausibles de soupçonner une personne d'avoir commis une infraction suffisent au début de l'enquête, ces motifs objectifs doivent passer ensuite de plausibles à vraisemblables, ainsi que cela a été rappelé dans plusieurs arrêts du Tribunal fédéral rendus dans la présente cause (arrêts 1B_99/2023 du 7 mars 2023 consid. 4.1; 1B_195/2020 du 18 mai 2020 consid. 2.1; 1B_497/2019 du 25 octobre 2019 consid. 2.1; 1B_143/2019 du 23 avril 2019 consid. 3.1). 
 
2.3. Le TPF s'est tout d'abord référé aux motifs exposés par le TMC-BE dans son ordonnance du 20 mars 2024, lequel constatait en particulier que les éléments soulevés par la défense n'étaient pas aptes à renverser les conclusions retenues le 4 décembre 2023 par le Tribunal fédéral, qui restaient pleinement d'actualité. Le TPF a ainsi rappelé les considérations ressortant de cet arrêt, puis a exposé les arguments avancés par le MPC dans sa requête de prolongation du 12 mars 2023. Il en ressortait en substance que plus aucun acte d'instruction n'avait été entrepris depuis la dernière prolongation de la détention provisoire, concernant le volet des violences physiques et sexuelles commises au préjudice de C.________. Le MPC avait en outre classé la procédure s'agissant de la plainte déposée par le recourant contre la plaignante. Des nouveaux actes d'instruction étaient intervenus dans le volet de l'homicide (art. 111, 112 CP), soit en particulier un rapport de la Police judiciaire fédérale (ci-après: la PJF) du 20 décembre 2023 et des auditions du recourant et de son ex-femme en janvier 2024. Le MPC avait également rappelé brièvement les faits instruits et les déclarations du recourant s'agissant des autres infractions objet de la procédure, soit l'instigation au faux témoignage (art. 307 al. 1 CP cum art. 24 CP), l'enregistrement non autorisé de conversations (art. 179ter CP), la représentation de la violence (art. 135 al. 1 et 1bis CP) et la pornographie (art. 197 al. 4 CP), les infractions à la LCR et celles à la LEtr, les crimes ou délits dans la faillite (art. 163 ss CP), ainsi que les infractions d'escroquerie (art. 146 CP), de faux dans les titres (art. 251 CP) et de blanchiment d'argent (art. 305bis CP). Il précisait encore ne plus envisager de mesure d'instruction et attendre le rapport final de la PJF, prévu pour fin mars/début avril 2024, à la suite duquel il procéderait à l'audition finale du recourant et des autres prévenus et au dépôt de l'acte d'accusation au début du mois de juin 2024.  
Compte tenu de ces considérations, en particulier du fait que plus aucun acte d'enquête n'avait été entrepris dans le volet de la procédure concernant C.________ depuis la dernière prolongation de la détention provisoire confirmée par le Tribunal fédéral dans son arrêt du 4 décembre 2023, le TPF a considéré que les soupçons demeuraient tels que retenus dans cet arrêt, quel que fût l'interprétation du recourant relative aux termes employés par le TMC-BE dans l'ordonnance entreprise et par le MPC dans sa réponse. Les messages du "chat351" auxquels se référaient le recourant et le TMC-BE ne constituaient au demeurant pas de nouveaux éléments de l'enquête; ils figuraient dans l'annexe au rapport de la PJF du 23 novembre 2022. Le TPF a encore souligné, s'agissant du volet de la procédure concernant D.________, que le recourant ne pouvait pas faire valoir que le TMC-BE avait retenu des charges "par erreur", puisqu'à ce jour, l'ensemble des charges ne lui avaient pas encore été communiqué. Cela ne l'avait toutefois pas empêché de faire valoir ses arguments sur ce point, devant la Cour des plaintes. En tout état, les soupçons de commission des infractions concernant les violences physiques et sexuelles commises à l'endroit de C.________ étaient toujours très sérieux et suffisamment graves pour maintenir le recourant en détention. 
Le TPF a par ailleurs relevé que les considérations du recourant relatives à la manière de mener l'enquête n'avaient pas à être examinées dans la procédure de prolongation de la détention. S'il estimait nécessaire de procéder à de nouvelles mesures d'enquête, il lui appartenait de s'en prévaloir en premier lieu devant le MPC. Enfin, il a rappelé qu'il appartenait au juge du fond - et non à celui de la détention - de faire une appréciation complète des éléments à charge et à décharge. 
 
2.4. Ce raisonnement ne prête pas le flanc à la critique et le recourant ne développe aucune argumentation propre à le remettre en question.  
En effet, le recourant ne saurait être suivi lorsqu'il affirme que le TPF aurait occulté les "nouveaux éléments" mis en exergue, en particulier certains messages provenant de la plaignante. L'autorité précédente ne les a pas ignorés puisqu'elle en a fait état dans la décision attaquée (cf. décision attaquée, consid. 2 p. 5, 2.2 p. 7 et 2.3.1 p. 9). Elle a néanmoins fait sienne l'appréciation du TMC-BE selon laquelle ces éléments ne permettaient pas d'affaiblir les forts soupçons existants à l'endroit du recourant s'agissant des infractions commises au préjudice de C.________, lesquels demeuraient tels que retenus par le Tribunal fédéral dans son arrêt du 4 décembre 2023. L'appréciation du TPF à cet égard résiste à l'examen. En effet, le caractère suggestif et l'ambiguïté des messages envoyés par la plaignante, que le recourant met en évidence en soumettant une sélection de certains échanges, ont déjà été relevés. Le TPF et le Tribunal fédéral à sa suite ont néanmoins retenu qu'ils ne permettaient pas d'affaiblir la vraisemblance de la commission des infractions par le recourant compte tenu, notamment, des explications données à ce sujet par la plaignante lors de son audition du 31 août 2023 (cf. arrêt 7B_885/2023 du 4 décembre 2023 consid. 3.4). En tant que le recourant livre sa propre interprétation des termes utilisés par le TMC-BE dans sa dernière ordonnance pour qualifier les soupçons existants et en déduit qu'ils représenteraient "une évolution dans la perception des soupçons correspondant à un affaiblissement très net de ceux-ci", il procède de manière purement appellatoire, partant irrecevable. 
En critiquant par ailleurs la manière dont l'enquête a été menée, le recourant semble s'en prendre à l'appréciation des preuves à laquelle a procédé l'autorité cantonale pour conclure à l'existence de sérieux soupçons. Toutefois, contrairement à ce qu'il soutient, le fait qu'il n'a jamais été entendu par le MPC, mais uniquement par la PJF, ne permet pas de remettre en cause l'appréciation des preuves opérée par la juridiction précédente. En effet, à ce stade de l'instruction, les diverses auditions de la plaignante, l'analyse des téléphones mobiles du recourant et le rapport d'expertise psychiatrique du 13 mars 2023 sont autant d'éléments qui permettent de fonder de sérieux soupçons quant à la réalisation des faits qui lui sont reprochés (cf. arrêts 1B_99/2023 du 7 mars 2023; 7B_411/2023 du 6 septembre 2023; 7B_885/2023 du 4 décembre 2023). 
Pour le reste, et comme cela a déjà été indiqué par le Tribunal fédéral dans ses arrêts des 7 mars 2023, 23 septembre 2023 et 4 décembre 2023, c'est au juge du fond et non à celui de la détention qu'il incombera, le cas échéant, d'examiner en détail les éléments de fait (notamment les différents messages de la plaignante), d'évaluer la valeur probante des différentes déclarations, de faire une appréciation complète des éléments à charge et à décharge et d'en tirer les conséquences qui s'imposent en matière de culpabilité. 
 
2.5. Il s'ensuit que le TPF n'a pas fait preuve d'arbitraire ni violé l'art. 221 al. 1 CPP en considérant qu'il existait encore de forts soupçons à l'égard du recourant s'agissant des infractions commises au préjudice de C.________.  
Dans ces circonstances, il n'y a pas lieu d'examiner plus avant les griefs du recourant relatifs au volet de la procédure concernant D.________. 
 
3.  
Le recourant invoque une violation des principes de la proportionnalité et de la célérité. 
 
3.1. Concrétisant le principe de la célérité consacré à l'art. 29 al. 1 Cst., l'art. 5 CPP impose aux autorités pénales d'engager les procédures pénales sans délai et de les mener à terme sans retard injustifié (al. 1), la procédure devant être conduite en priorité lorsqu'un prévenu est placé en détention (al. 2). Une incarcération peut être considérée comme disproportionnée en cas de retard injustifié dans le cours de la procédure pénale. Selon la jurisprudence, il doit toutefois s'agir d'un manquement particulièrement grave, faisant au surplus apparaître que l'autorité de poursuite n'est plus en mesure de conduire la procédure à chef dans un délai raisonnable (ATF 140 IV 74 consid. 3.2; 128 I 149 consid. 2.2.1). Le caractère raisonnable de la durée d'une procédure pénale s'apprécie selon les circonstances particulières de la cause, eu égard en particulier à la complexité de l'affaire, au comportement du requérant et à celui des autorités compétentes, ainsi qu'à l'enjeu du litige pour l'intéressé (ATF 133 I 270 consid. 3.4.2).  
Quant au principe de la proportionnalité, il postule que toute personne qui est mise en détention préventive a le droit d'être jugée dans un délai raisonnable ou d'être libérée pendant la procédure pénale (art. 31 al. 3 Cst. et 5 par. 3 CEDH). Une durée excessive de la détention constitue une limitation disproportionnée du droit à la liberté personnelle, lequel est notamment violé lorsque la durée de la détention préventive dépasse la durée probable de la peine privative de liberté à laquelle il faut s'attendre (art. 212 al. 3 CPP). Dans l'examen de la proportionnalité de la durée de la détention, il y a lieu de prendre en compte la gravité des infractions faisant l'objet de l'instruction. Le juge peut maintenir la détention préventive aussi longtemps qu'elle n'est pas très proche de la durée de la peine privative de liberté à laquelle il faut s'attendre concrètement en cas de condamnation (ATF 133 I 168 consid. 4.1 et les références). A moins que celui-ci soit d'emblée évident, il n'y a pas lieu de prendre en compte un éventuel sursis (cf. ATF 133 I 270 consid. 3.4.2). 
 
3.2. En l'espèce, contrairement à ce que soutient le recourant, le TPF n'a pas considéré que la détention respectait le principe de la proportionnalité uniquement en raison de la gravité des faits reprochés. Il a tenu compte de l'ensemble des peines menaces pour les infractions pour lesquelles de forts soupçons pesaient contre le recourant, à savoir 3 ans au plus pour les lésions corporelles simples et les menaces, entre 1 et 10 ans pour le viol et 5 ans au plus pour l'incitation au faux témoignage, l'escroquerie et le faux dans les titres. Puis, il a considéré que la détention subie par le recourant depuis son incarcération le 17 décembre 2021, à laquelle s'ajoutait celle demandée par le MPC le 12 mars 2024, soit un total de 30 mois, demeurait encore compatible avec la sanction prévisible au regard notamment de la gravité et de la longue période sur laquelle portaient les viols.  
Ce raisonnement ne prête pas le flanc à la critique et le recourant n'apporte aucun argument susceptible de le remettre en cause. En effet, en tant qu'il part de la prémisse erronée que les soupçons de viol se seraient affaiblis, son argumentation est mal fondée (cf. consid. 2.5 supra). Par ailleurs, le recourant ne saurait rien tirer de l'injonction donnée par Tribunal fédéral au MPC, dans son arrêt 1B_99/2023 du 7 mars 2023, de procéder rapidement. Le Tribunal fédéral avait alors considéré que le résultat de l'expertise psychiatrique prévue sur la personne du recourant permettrait une meilleure appréciation des soupçons de culpabilité. Il avait donc enjoint au MPC de faire en sorte qu'un rapport soit rapidement rendu, ajoutant que l'instruction devrait alors toucher à sa fin sans tarder et la mise en accusation intervenir rapidement le cas échéant (cf. arrêt 1B_99/2023 précité consid. 5.2). Or le rapport d'expertise psychiatrique a bel et bien été rendu et il en ressortait notamment une tendance manipulatoire et dominatrice du recourant permettant de renforcer la crédibilité de la plaignante et, partant, les soupçons existants. De plus, depuis cet arrêt, la procédure contre le recourant s'est étendue à d'autres infractions.  
La durée de la procédure ne viole pas non plus le principe de la célérité d'une manière qui permettrait de considérer que la détention provisoire subie serait disproportionnée. Le recourant estime que si le Tribunal fédéral pouvait certes considérer que le principe de la célérité n'était pas violé lorsqu'il avait rendu son arrêt le 6 septembre 2023, la situation serait néanmoins différente aujourd'hui, quelques 8 mois plus tard. Il ne saurait être suivi. En effet, dans la décision attaquée, la juridiction précédente a constaté - d'une manière qui lie le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF) et que le recourant ne conteste pas - que depuis la dernière demande de prolongation de la détention provisoire, le MPC a notamment mené des actes d'instruction dans le volet de l'homicide, en particulier l'audition de l'ex-femme du recourant et de celui-ci en janvier 2024. Il a ordonné le classement de la procédure s'agissant de la plainte déposée par le recourant contre la plaignante le 1er février 2024. Il a également instruit les faits s'agissant des autres infractions auxquelles s'était étendue la procédure (cf. consid. 2.3 supra). On ne saurait dans ces circonstances reprocher au MPC d'être resté inactif depuis septembre 2023. L'argumentation du recourant ne permet pas de démontrer le contraire. En effet, il se limite à mettre en évidence des temps morts en ne se fondant que sur un seul volet de la procédure ou critique d'une manière purement appellatoire les jonctions ou disjonctions des causes ordonnées, estimant qu'elles apparaissaient "sans cohérence perceptible".  
 
3.3. En définitive, les principes de la proportionnalité et de la célérité n'ont pas été violés par les autorités précédentes. Cela étant, si l'instruction n'a pas connu de temps morts, la détention provisoire ne saurait se prolonger indéfiniment. Il appartiendra au MPC de faire preuve de diligence dans la suite de l'instruction pour procéder rapidement à une mise en accusation.  
 
4.  
Il s'ensuit que le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. 
Le recourant a demandé l'octroi de l'assistance judiciaire (art. 64 al. 1 LTF). Les conditions y relatives étant réunies, il y a lieu d'admettre cette requête et de désigner Me Philippe Girod en tant qu'avocat d'office pour la procédure devant le Tribunal fédéral et de lui allouer une indemnité à titre d'honoraires, qui sera supportée par la caisse du Tribunal fédéral (art. 64 al. 2 LTF). Le recourant est toutefois rendu attentif à son obligation de rembourser la caisse du Tribunal fédéral s'il retrouve ultérieurement une situation financière lui permettant de le faire (cf. art. 64 al. 4 LTF). Il ne sera pas perçu de frais judiciaires (art. 64 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
La requête d'assistance judiciaire est admise. 
 
2.1. Me Philippe Girod est désigné comme avocat d'office du recourant et une indemnité de 1'500 fr. lui est allouée à titre d'honoraires, à payer par la caisse du Tribunal fédéral.  
 
2.2. Il n'est pas perçu de frais judiciaires.  
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué au recourant, au Ministère public de la Confédération, au Tribunal pénal fédéral, Cour des plaintes, et au Tribunal cantonal des mesures de contrainte du canton de Berne. 
 
 
Lausanne, le 31 mai 2024 
 
Au nom de la IIe Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Abrecht 
 
La Greffière : Paris