2C_611/2023 23.04.2024
Avis important:
Les versions anciennes du navigateur Netscape affichent cette page sans éléments graphiques. La page conserve cependant sa fonctionnalité. Si vous utilisez fréquemment cette page, nous vous recommandons l'installation d'un navigateur plus récent.
 
 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
2C_611/2023  
 
 
Arrêt 23 avril 2024  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
Mme et MM. les Juges fédéraux Aubry Girardin, Présidente, Donzallaz, Hänni, Ryter et Kradolfer. 
Greffière : Mme Joseph. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Hüsnü Yilmaz, avocat, 
recourant, 
 
contre 
 
Service de la population et des migrations du canton du Valais, 
avenue de la Gare 39, 1951 Sion. 
Conseil d'Etat du canton du Valais, 
place de la Planta, Palais du Gouvernement, 1950 Sion, 
 
Objet 
Admission provisoire, refus d'octroi d'une autorisation de séjour, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour de droit public, du 3 octobre 2023 (A1 23 11). 
 
 
Faits :  
 
A.  
A.________, ressortissant syrien né en 1985, a passé les dix premières années de sa vie en Syrie avant de s'installer au Liban, pays où il a obtenu un bachelor en informatique administrative de l'Université U.________ et travaillé durant deux ans comme enseignant. 
Le 13 novembre 2015, A.________ est entré en Suisse et a déposé une demande d'asile le 2 décembre 2015, laquelle a été rejetée par décision du Secrétariat d'Etat aux migrations (ci-après: SEM) du 22 août 2018. Cette décision prononçait en outre son renvoi de Suisse ainsi que son admission provisoire (permis F), le renvoi n'étant pas raisonnablement exigible. Le permis F de A.________ a été régulièrement renouvelé depuis lors. 
Durant son séjour en Suisse, l'intéressé a participé à un projet d'insertion sociale et professionnelle comme peintre, de juin à décembre 2016. Il a ensuite exercé une activité d'ouvrier agricole avant de travailler comme chauffeur à plein temps dès le 1er janvier 2019 pour un salaire mensuel brut de 3'750 fr., ce qui lui a permis d'acquérir son autonomie financière dès cette date. Les frais d'assistance qu'il a perçus jusqu'à ce qu'il devienne financièrement autonome s'élèvent à 42'839 fr. 75. L'intéressé n'a fait l'objet d'aucune poursuite ou acte de défaut de biens. Son casier judiciaire est vierge. Il a appris le français (niveau B1). 
 
B.  
Le 9 décembre 2020, A.________ a sollicité la transformation de son admission provisoire en autorisation de séjour (permis B). Le 25 janvier 2022, la Commission consultative en matière de cas de rigueur dans le domaine des étrangers a rendu un préavis défavorable concernant cette demande. 
Par décision du 3 mai 2022, le Service de la population et des migrations du canton du Valais (ci-après: Service cantonal) a refusé d'octroyer une autorisation de séjour à A.________. En substance, il a retenu que malgré le séjour d'une certaine durée et la bonne intégration, les conditions relatives au cas individuel d'une extrême gravité n'étaient pas remplies. 
Le 2 juin 2022, A.________ a formé un recours administratif contre cette décision auprès du Conseil d'Etat, concluant principalement à son annulation et à l'octroi du permis B, ainsi que, subsidiairement, au renvoi du dossier à l'autorité précédente pour nouvelle décision. Par décision du 14 décembre 2022, le Conseil d'Etat a rejeté ce recours. 
Le 18 janvier 2023, A.________ a saisi la Cour de droit public du Tribunal cantonal du canton du Valais (ci-après: Tribunal cantonal) d'un recours de droit administratif, concluant sous suite de frais et dépens à l'annulation de cette décision et à la délivrance d'une autorisation de séjour en sa faveur et, subsidiairement, au renvoi du dossier de la cause au Conseil d'Etat pour nouvelle décision. Ce recours a été rejeté par arrêt du 3 octobre 2023. 
 
C.  
Le 6 novembre 2023, A.________ a déposé un recours en matière de droit public auprès du Tribunal fédéral. Il conclut principalement à ce que l'arrêt du 3 octobre 2023 rendu par le Tribunal cantonal soit réformé en ce sens qu'une autorisation de séjour de type B lui soit délivrée, la cause étant renvoyée à ce tribunal pour fixer les frais et dépens. Subsidiairement, il conclut à l'annulation de l'arrêt rendu le 3 octobre 2023 par le Tribunal cantonal, la cause lui étant renvoyée pour nouvelle instruction et nouvelle décision. Il sollicite également le bénéfice de l'assistance judiciaire partielle limitée aux frais. 
Par ordonnance du 7 novembre 2023, la Présidente de la IIe Cour de droit public a requis le paiement de l'avance de frais, la demande d'assistance judiciaire n'étant pas suffisamment motivée, des renseignements complets et preuves concernant la situation financière actuelle pouvant être déposés dans le délai pour s'acquitter de l'avance de frais. Le recourant s'est acquitté de l'avance de frais, sans compléter sa demande. 
Le Tribunal cantonal a renoncé à se déterminer. Le Conseil d'Etat s'est rallié aux considérants de l'arrêt attaqué et a conclu au rejet du recours. Le Service cantonal a déposé des déterminations et conclu, principalement, à ce que le recours soit déclaré irrecevable, subsidiairement à ce qu'il soit rejeté. A.________ a déposé des observations complémentaires. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 147 I 333 consid. 1). 
 
1.1. Le recourant déclare former un recours en matière de droit public à l'encontre de l'arrêt du Tribunal cantonal confirmant le refus de lui accorder une autorisation de séjour (permis B), et le maintenant dans son statut d'admis provisoire (permis F).  
D'après l'art. 83 let. c ch. 2 LTF, le recours en matière de droit public est irrecevable contre les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit. Selon la jurisprudence, il suffit toutefois, sous l'angle de la recevabilité, qu'il existe un droit potentiel à l'autorisation, étayé par une motivation soutenable, pour que cette clause d'exclusion ne s'applique pas et que la voie du recours en matière de droit public soit ouverte (ATF 147 I 268 consid. 1.2; 147 I 89 consid. 1.1.1; 139 I 330 consid. 1.1). En outre, l'art. 83 let. c ch. 5 LTF exclut du champ du recours en matière de droit public les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent les dérogations aux conditions d'admission. 
 
1.2. Le recourant a requis, le 9 décembre 2020, la transformation de son admission provisoire (permis F) en autorisation de séjour (permis B). Selon l'art. 84 al. 5 LEI (RS 142.20), les demandes d'autorisation de séjour déposées par un étranger admis à titre provisoire et résidant en Suisse depuis plus de cinq ans sont examinées de manière approfondie en fonction de son niveau d'intégration, de sa situation familiale et de l'exigibilité d'un retour dans son pays de provenance. L'autorisation décernée sur cette base, appelée "permis B cas de rigueur" ou encore "permis B humanitaire", est une autorisation accordée en dérogation aux conditions d'admission au sens de l'art. 30 al. 1 let. b LEI (Samah Posse-Ousmane, in Code annoté de droit des migrations, vol. II, 2017, ch. 16 ad art. 84; Peter Bolzli, in Migrationsrecht, 2022, n. 10 ad art. 84; cf. aussi arrêt 2C_370/2022 du 28 juillet 2022 consid. 1.2). Le recourant n'a donc aucun droit à l'obtenir (arrêt 2C_198/2023 du 7 février 2024 consid. 1.1.3).  
 
1.3. Par ailleurs, le recourant ne saurait se prévaloir du droit à obtenir une autorisation de séjour sur la base d'une autre disposition, en particulier l'art. 8 CEDH sous l'angle de la vie familiale, dès lors qu'il ressort des constatations de fait que sa famille est au Liban. En outre, compte tenu de sa durée de séjour en Suisse et d'une intégration certes bonne mais pas hors du commun, il ne peut davantage se prévaloir du droit à la vie privée (cf. ATF 149 I 207 consid. 5.3.1 et 5.3.4; 144 II 1 consid. 6.1; arrêt 2D_21/2023 du 18 décembre 2023 consid. 1.1.3).  
 
1.4. Le recourant évoque aussi une violation de l'art. 14 Cst., soit du droit au mariage. Il n'explique toutefois nullement en quoi ce droit serait violé (cf. art. 106 al. 2 LTF), de sorte que son grief n'est pas recevable et ne saurait ainsi justifier d'ouvrir la voie du recours en matière de droit public. Au demeurant, il ressort de l'arrêt attaqué qu'il n'a jamais allégué avoir un projet de mariage.  
 
1.5. Le recourant fonde son argumentation sur une inégalité de traitement (art. 8 al. 1 Cst.) et l'existence d'une discrimination (art. 8 al. 2 Cst.) entre les titulaires d'un permis F ("admission provisoire") et les détenteurs d'un permis S ("protection provisoire"), statut accordé aux ressortissants ukrainiens.  
La jurisprudence n'exclut pas que l'interdiction de la discrimination fondée sur l'art. 8 al. 2 Cst. puisse, à titre exceptionnel, fonder un droit potentiel à l'obtention d'une autorisation de séjour ouvrant la voie du recours en matière de droit public, à condition que le recourant rende plausible qu'il peut tirer de l'art. 8 al. 2 Cst. un droit potentiel à une autorisation de séjour (ATF 147 I 89 consid. 1.1.4; arrêt 2D_7/2022 du 12 janvier 2023 consid. 1.1.2). En l'occurrence, le recourant ne rend nullement vraisemblable, et on ne le discerne pas du reste, que la discrimination puisse conduire à lui accorder un droit à une autorisation de séjour, alors qu'actuellement aucune personne titulaire d'un permis S ne peut faire valoir un tel droit. 
 
1.6. Au vu de ce qui précède, le recours en matière de droit public est irrecevable.  
 
2.  
Seule reste ouverte la voie du recours constitutionnel subsidiaire (art. 113 LTF a contrario). Le recourant n'a pas indiqué former un tel recours. Selon la jurisprudence, l'intitulé erroné d'un recours n'influence toutefois pas sa recevabilité, pour autant que l'écriture remplisse les conditions formelles de la voie de droit qui est ouverte (cf. ATF 138 I 367 consid. 1.1; 134 III 379 consid. 1.2; 133 I 300 consid. 1.2). 
 
2.1. La qualité pour former un recours constitutionnel subsidiaire suppose non seulement que le recourant ait pris part, comme en l'espèce, à la procédure devant l'autorité précédente ou ait été privé de la possibilité de le faire (art. 115 let. a LTF), mais aussi que l'intéressé jouisse d'un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée (art. 115 let. b LTF).  
 
2.2. De manière générale, le Tribunal fédéral entre en matière sur les recours constitutionnels subsidiaires dirigés contre des décisions cantonales ne pouvant faire l'objet d'aucun recours en matière de droit public au sens de l'art. 83 LTF, lorsqu'il leur est reproché, de manière suffisamment plausible (art. 106 al. 2 LTF), de violer dans le raisonnement le principe d'interdiction de la discrimination, ancré à l'art. 8 al. 2 Cst., étant précisé que cette disposition constitutionnelle offre une protection accrue par rapport au principe général de l'égalité de traitement consacré à l'art. 8 al. 1 Cst. Dans une telle hypothèse, le Tribunal fédéral reconnaît l'existence d'un intérêt juridiquement protégé pour le recourant à faire vérifier que l'autorité inférieure n'a pas violé la disposition précitée en se laissant guider de manière déterminante par un critère potentiellement discriminatoire (ATF 147 I 89 consid. 1.2.3 et les arrêts cités), même si on ne peut tirer de l'art. 8 al. 2 Cst. un droit potentiel à l'autorisation de séjour (cf. supra consid. 1.5; ATF 147 I 89 consid. 1.1.4 et 1.1.5) et que l'admission du recours sur ce point ne doit finalement conduire qu'au renvoi de la cause pour réexamen (ATF 147 I 89 consid. 1.2.3 et les arrêts cités).  
En l'espèce, le Tribunal cantonal a écarté l'existence d'une discrimination envers le recourant par rapport aux personnes titulaires d'un permis S. Ce dernier le conteste devant le Tribunal fédéral, invoquant une violation de l'art. 8 al. 2 Cst. d'une manière suffisante (art. 106 al. 2 LTF). Sous cet angle, il dispose donc d'un intérêt juridiquement protégé au sens de l'art. 115 LTF, étant précisé que le grief relatif à la violation de l'art. 8 al. 1 Cst. est inclus dans celui concernant l'art. 8 al. 2 Cst., puisque cette dernière disposition offre une protection accrue. 
 
2.3. En outre, dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF, par renvoi de l'art. 117 LTF), rendue par une autorité cantonale supérieure de dernière instance (art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF, par renvoi de l'art. 114 LTF), le recours a été déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF, par renvoi de l'art. 117 LTF) et dans les formes requises (art. 42 LTF). Le recours constitutionnel subsidiaire est donc en principe recevable.  
 
2.4. Au vu de ce qui précède, il y a lieu d'entrer en matière sur le recours, en tant que recours constitutionnel subsidiaire.  
 
3.  
 
3.1. Le recours constitutionnel subsidiaire ne peut être formé que pour violation des droits constitutionnels (art. 116 LTF). En vertu de l'art. 106 al. 2 LTF, applicable par renvoi de l'art. 117 LTF, les griefs y relatifs doivent être invoqués et motivés de façon détaillée en précisant en quoi consiste la violation, sous peine d'irrecevabilité (ATF 138 I 232 consid. 3; arrêt 2C_568/2023 du 17 janvier 2024 consid. 4).  
 
3.2. Le Tribunal fédéral statue pour le reste sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 118 al. 1 LTF). Il peut rectifier ou compléter les constatations de l'autorité précédente si les faits ont été établis en violation d'un droit constitutionnel (art. 118 al. 2 LTF), soit arbitrairement, ce que la partie recourante doit démontrer d'une manière circonstanciée et précise, conformément aux exigences de motivation posées à l'art. 106 al. 2 LTF (par renvoi de l'art. 117 LTF; cf. ATF 141 I 36 consid. 1.3; 136 I 332 consid. 2.1; 133 III 439 consid. 3.2).  
 
4.  
Le recourant dénonce des différences de traitement selon que la personne étrangère est soumise au régime du permis F (admission provisoire), ou à celui du permis S (protection provisoire des personnes à protéger). Il fait valoir en particulier qu'un ukrainien ayant fui la guerre, titulaire d'un permis S, aurait un droit, après cinq ans, à un permis de séjour. En revanche, un syrien ayant fui la guerre, titulaire d'un permis F, ne bénéficierait pas d'un tel droit, mais devrait remplir les conditions du cas de rigueur. Ces différences de traitement ne seraient pas fondées sur une raison objective, mais sur l'origine nationale. Il y aurait ainsi violation de l'interdiction de la discrimination. 
 
4.1. Selon l'art. 8 al. 2 Cst., nul ne doit subir de discrimination du fait, notamment, de son origine, de sa race, de son sexe, de son âge, de sa langue, de sa situation sociale, de son mode de vie, de ses convictions religieuses, philosophiques ou politiques, ni du fait d'une déficience corporelle, mentale ou psychique.  
Une discrimination au sens de cette disposition est réalisée lorsqu'une personne est juridiquement traitée de manière différente, uniquement en raison de son appartenance à un groupe déterminé historiquement ou dans la réalité sociale contemporaine, mise à l'écart ou considérée comme de moindre valeur. La discrimination constitue une forme qualifiée d'inégalité de traitement de personnes dans des situations comparables, dans la mesure où elle produit sur un être humain un effet dommageable, qui doit être considéré comme un avilissement ou une exclusion, car elle se rapporte à un critère de distinction qui concerne une part essentielle de l'identité de la personne intéressée ou à laquelle il lui est difficilement possible de renoncer (ATF 148 I 160 consid. 8.1; 145 I 73 consid. 5.1; 143 I 129 consid. 2.3.1). Le principe de non-discrimination n'interdit toutefois pas toute distinction basée sur l'un des critères énumérés à l'art. 8 al. 2 Cst., mais fonde plutôt le soupçon d'une différenciation inadmissible. Les inégalités qui résultent d'une telle distinction doivent dès lors faire l'objet d'une justification particulière (ATF 143 I 129 consid. 2.3.1; 142 V 316 consid. 6.1.1; 137 V 334 consid. 6.2.1). 
 
4.2. Le Tribunal fédéral a eu l'occasion de préciser que les réfugiés admis à titre provisoire, en tant que groupe, ne tombaient en principe pas dans le champ de protection de l'art. 8 al. 2 Cst., par comparaison à des personnes séjournant en Suisse au bénéfice d'un titre de séjour (cf. arrêts 2C_198/2023 du 7 février 2024 consid. 7.1; 1D_3/2014 du 11 mars 2015 consid. 5.2.4 et 5.2.5). La situation est différente en l'espèce, puisque le recourant invoque une différence de traitement fondée sur la nationalité, susceptible de violer l'interdiction de la discrimination entre deux groupes au bénéfice d'un statut précaire, à savoir les personnes au bénéficie d'une admission provisoire (permis F) et celles au bénéfice d'un permis S (protection provisoire des personnes à protéger). Sous cet angle, il peut se prévaloir de l'art. 8 al. 2 Cst.  
 
4.3. Le régime de la protection provisoire des personnes à protéger est prévue par la loi fédérale sur l'asile (LAsi; RS 142.31). L'étranger qui se voit attribuer le statut de personne à protéger reçoit un permis S (cf. 71a al. 1 let. d de l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative, OASA; RS 142.201).  
 
4.3.1. Selon l'art. 4 LAsi, la Suisse peut accorder la protection provisoire à des personnes à protéger aussi longtemps qu'elles sont exposées à un danger général grave, notamment pendant une guerre ou une guerre civile ou lors de situations de violence généralisée. Le Conseil fédéral décide si la Suisse accorde la protection provisoire à des groupes de personnes à protéger et selon quels critères (art. 66 al. 1 LAsi). Selon l'art. 76 al. 1 LAsi, c'est également le Conseil fédéral qui a la compétence de rendre une décision de portée générale levant la protection provisoire.  
Il ressort du Message concernant la révision totale de la loi sur l'asile ainsi que la modification de la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers du 4 décembre 1995 que la protection provisoire est une protection collective, accordée à un groupe déterminé de personnes étrangères pour la durée d'une menace. L'idée du législateur était notamment de prévoir un système afin que les autorités compétentes ne doivent plus mener une procédure individuelle longue et coûteuse dans le cas de mouvements de fuite massive de population résultant d'une guerre (cf. FF 1996 II 1, p. 3 et 17 ss). La réglementation est toutefois conçue comme étant temporaire, avec un retour dans le pays d'origine ou de provenance après la fin du conflit. 
 
4.3.2. Le 11 mars 2022 et pour la première fois, le Conseil fédéral a adopté la décision de portée générale concernant l'octroi de la protection provisoire en lien avec la situation en Ukraine (FF 2022 586).  
L'étranger qui se voit attribuer le statut de personne à protéger doit notamment résider dans le canton auquel il a été attribué (art. 74 al. 1 LAsi). Un changement de canton est possible en cas de raisons particulières. La personne à protéger a le droit d'exercer une activité lucrative, sous réserve d'un délai d'attente de trois mois, délai toutefois supprimé dans le cadre de la protection provisoire en lien avec la situation en Ukraine (cf. art. 75 LAsi et 53 OASA). Elle peut voyager à l'étranger et revenir en Suisse, moyennant une autorisation; cette exigence ayant également été supprimée pour ce qui est de la protection provisoire en lien avec la situation en Ukraine (art. 9 al. 7 et 8 de l'ordonnance sur l'établissement de documents de voyage pour étrangers, ODV; RS 143.5). 
Selon l'art. 74 al. 2 LAsi, le titulaire d'un permis S bénéficie d'un droit à une autorisation de séjour si, après cinq ans, le Conseil fédéral n'a pas levé la protection provisoire. Cette autorisation de séjour prend toutefois fin au moment où la protection provisoire est levée. 
 
4.4. Pour sa part, le régime de l'admission provisoire est principalement régi par la LEI. L'étranger qui en bénéficie reçoit un permis F (art. 41 al. 2 LEI et 71a let. c OASA).  
 
4.4.1. L'admission provisoire est une mesure de substitution au renvoi de ressortissants étrangers, octroyée lorsque le renvoi vers leur pays d'origine est impossible, illicite ou ne peut être raisonnablement exigé; ce statut est délivré sur décision du SEM (art. 83 al. 1 LEI).  
L'admission provisoire constitue en d'autres termes une mesure qui se substitue, en principe pour une durée limitée, à la mise en oeuvre du renvoi lorsque celui-ci s'avère inexécutable. Elle coexiste donc avec la mesure de renvoi entrée en force, dont elle ne remet pas en cause la validité. L'admission provisoire n'équivaut pas à une autorisation de séjour, mais fonde un statut provisoire qui réglemente la présence en Suisse de l'étranger tant et aussi longtemps que l'exécution de son renvoi - c'est-à-dire la mesure exécutoire du renvoi visant à éliminer une situation contraire au droit - apparaîtra comme impossible, illicite ou non raisonnablement exigible (cf. ATF 147 I 268 consid. 4.2.1; 141 I 49 consid. 3.5; 138 I 246 consid. 2.3). 
 
4.4.2. La décision d'admission provisoire peut aussi bien concerner une personne passée par la procédure d'asile (requérant d'asile débouté, cf. art. 44 LAsi) qu'une personne soumise à la loi sur les étrangers (cf. art. 5 et 65 LEI) (Samah Posse-Ousmane, in Code annoté de droit des migrations, vol. II, 2017, ch. 2 à 5 ad art. 83).  
L'étranger admis à titre provisoire et titulaire d'un permis F doit en principe résider dans le canton qui lui a délivré le permis, mais peut déposer une demande de changement de canton (cf. art. 85 al. 3 à 5 LEI). Selon l'art. 85a LEI, l'étranger admis à titre provisoire peut exercer une activité lucrative dans toute la Suisse si les conditions de rémunération et de travail usuelles du lieu, de la profession et de la branche sont respectées. Il ne peut pas voyager à l'étranger sans autorisation préalable (cf. art. 9 al. 1 à 6 ODV). 
Le titulaire d'un permis F ne bénéficie pas d'un droit à obtenir une autorisation de séjour sur le fondement du droit interne. Toutefois, il est susceptible d'obtenir une autorisation de séjour pour cas de rigueur, l'art. 84 al. 5 LEI imposant aux autorités d'examiner de manière approfondie les demandes déposées par un étranger admis provisoirement et résidant en Suisse depuis plus de cinq ans. La jurisprudence a en outre précisé que, après dix ans de séjour au titre d'une admission provisoire, seuls des motifs sérieux peuvent justifier le refus de l'autorisation requise (cf. ATF 144 I 266 consid. 3.9; arrêt 2C_198/2023 du 7 février 2024 consid. 6.7.2). 
 
4.5. Le recourant remet en cause le statut d'admis provisoire avec un permis F dont il bénéficie, par rapport au statut des personnes ukrainiennes titulaires d'un permis S. Il critique particulièrement l'absence de droit à une autorisation de séjour après 5 ans en Suisse, pour le titulaire du permis F.  
 
4.5.1. Il se trouve que les différences entre les statuts de titulaires de permis F et de permis S (cf. supra consid. 4.3 et 4.4) découlent de lois fédérales, à savoir la LAsi et la LEI. Or, il n'appartient pas au Tribunal fédéral de revoir les lois fédérales qu'il est tenu d'appliquer (art. 190 Cst.). Celui-ci a certes le pouvoir de constater qu'une loi fédérale viole la Constitution, mais ne peut pas sanctionner cette violation (cf. ATF 149 I 41 consid. 6.3; 137 I 128 consid. 4.3.2).  
 
4.5.2. En l'espèce, on ne voit pas que le recourant, en tant que titulaire d'un permis F, soit discriminé par rapport au titulaire d'un permis S, de sorte qu'il se justifierait de le constater. En effet, il s'agit de deux statuts certes comparables, mais qui comportent des différences juridiques et qui répondent chacun à une logique qui lui est propre. Chaque statut comporte des avantages et des inconvénients, comme on l'a vu (cf. supra consid. 4.4 et 4.5).  
 
4.5.3. En lien avec la critique du recourant concernant l'octroi d'un titre de séjour, il convient certes d'admettre que le titulaire d'un permis S, contrairement au titulaire d'une permis F, se voit conférer par le droit fédéral un droit à un permis de séjour après 5 ans. Toutefois, cette autorisation prend fin au moment où la protection provisoire est levée par le Conseil fédéral (cf. art. 74 al. 2 LAsi, cf. supra consid. 4.3.3 in fine). Quant au titulaire d'un permis F, il n'a certes pas droit à une autorisation de séjour après cinq ans, mais néanmoins les autorités doivent examiner de manière approfondie sa demande s'il réside en Suisse depuis plus de cinq ans (art. 84 al. 5 LEI); cette autorisation n'est en revanche pas soumise à la condition du maintien d'une protection provisoire accordée de manière générale (cf. art. 84 al. 4 LEI). On ne peut donc affirmer que le statut du permis S serait, sous cet angle, plus favorable que celui du permis F.  
 
4.6. Par conséquent, le grief reposant sur l'art. 8 al. 2 Cst. est infondé.  
 
5.  
Le recourant se prévaut également de l'interdiction des discriminations consacrée par l'art. 14 CEDH
 
5.1. L'interdiction de discrimination prévue par l'art. 14 CEDH n'a pas d'effet absolu, mais seulement accessoire; elle suppose que le champ d'application de l'un des articles de la Convention ou de ses protocoles additionnels soit ouvert (cf. arrêts CourEDH Semenya c. Suisse du 11 juillet 2023, § 119 s; Fábián c. Hongrie du 5 septembre 2017, § 112; cf. aussi ATF 143 I 1 consid. 5.5; arrêts 2C_198/2023 du 7 février 2024 consid. 7.2; 2C_121/2022 du 24 novembre 2022 consid. 5.2).  
 
5.2. Le recourant mentionne les art. 8 CEDH (droit au respect de la vie privée et familiale) et 12 CEDH (droit au mariage). Or, comme on l'a vu, il ne saurait se prévaloir de ces dispositions (cf. supra consid. 1.3 et 1.4), de sorte que l'art. 14 CEDH ne s'applique pas.  
 
6.  
Le recourant mentionne enfin une violation de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale du 21 décembre 1965 (RS 0.104). Ce texte est entré en vigueur pour la Suisse le 29 décembre 1994 (RO 1995 p. 1164 ss), et vise toute distinction, exclusion, restriction ou préférence fondée sur la race, la couleur, l'ascendance ou l'origine nationale ou ethnique (art. 1er ch. 1). 
Comme déjà indiqué (cf. supra consid. 4.5.2 et 4.5.3), aucune discrimination n'est établie de sorte que ce grief est également rejeté. 
 
7.  
Il s'ensuit que le recours constitutionnel subsidiaire est rejeté. 
Partant, les frais judiciaires seront mis à la charge du recourant qui succombe (cf. art. 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens (art. 68 al. 1 et 3 LTF). 
La demande d'assistance judiciaire partielle est rejetée, le recourant n'ayant pas démontré ne pas disposer de ressources suffisantes (art. 64 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours en matière de droit public est irrecevable. 
 
2.  
Le recours constitutionnel subsidiaire est rejeté. 
 
3.  
La demande d'assistance judiciaire partielle est rejetée. 
 
4.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'000.-, sont mis à la charge du recourant. 
 
5.  
Le présent arrêt est communiqué au recourant, au Conseil d'Etat du canton du Valais, au Service de la population et des migrations du canton du Valais, au Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour de droit public, et au Secrétariat d'Etat aux migrations. 
 
 
Lausanne, le 23 avril 2024 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : F. Aubry Girardin 
 
La Greffière : M. Joseph