1C_124/2023 01.09.2023
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1C_124/2023  
 
 
Arrêt du 1er septembre 2023  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Kneubühler, Président, 
Chaix et Haag. 
Greffier : M. Parmelin. 
 
Participants à la procédure 
A.________, représenté par Me Anne-Sophie Brady, avocate, 
recourant, 
 
contre  
 
Syndicat d'améliorations foncières de Siviriez, 
1677 Prez-vers-Siviriez, 
Commission de classification du Syndicat d'améliorations foncières de Siviriez, 
 
B.________, 
 
Objet 
Améliorations foncières; servitude de passage, 
 
recours contre la décision de la Commission de recours en matière d'améliorations foncières de l'Etat de Fribourg du 16 septembre 2022 (175 2021 2). 
 
 
Faits :  
 
A.  
A.________ exploite un domaine agricole à Blessens. Il est notamment propriétaire de la parcelle n° 155 du registre foncier de la commune de Siviriez. Cette parcelle, d'une surface de 1'542 mètres carrés, se caractérise par une pente variant entre 68% et 12,75% et accueille un verger d'une vingtaine d'arbres fruitiers à hautes tiges. 
B.________ est propriétaire de la parcelle n° 313 du registre foncier de la commune de Siviriez. Cette parcelle de 80'418 mètres carrés, en nature de pré, supporte une habitation avec rural, un hangar et une habitation individuelle, à proximité de la route de Prez. Elle est grevée d'une servitude de passage inscrite au registre foncier le 19 septembre 1947 qui confère à son bénéficiaire le droit de passer par le tracé décrit dans l'acte de vente notarié du 19 août 1947, pour accéder à un dépôt de matériaux avec bâtiment situé sur l'actuelle parcelle n° 155. 
 
B.  
Du 13 juin au 13 juillet 2020, le Syndicat d'améliorations foncières de Siviriez a notamment soumis à l'enquête publique le nouvel état de propriété, des servitudes, des charges foncières, des droits personnels annotés ainsi que l'avant-projet et les projets des travaux collectifs. Le projet prévoyait le report de la servitude de passage à pied et pour tout véhicule inscrite au registre foncier le 19 septembre 1947 à charge de la parcelle NE 11.1 (anciennement n° 313) et en faveur des parcelles nos 155 et 156. L'accès auxdites parcelles depuis la route communale de Prez se ferait par un chemin chaintre de 140 mètres qui passe à travers la parcelle n° 313 au nord de celle-ci pour longer ensuite le bas de la parcelle n° 155 (tracé bleu). 
A.________ a fait opposition à la localisation de la servitude de passage dont il est bénéficiaire, en raison de la forte pente du chemin chaintre prévu pour accéder à sa parcelle, qui rendrait son usage dangereux pour les véhicules légers, les remorques et les tracteurs avec machines. A l'audience de conciliation, il a proposé d'entériner le tracé qu'il emprunte actuellement depuis la route de Prez et qui passe entre les bâtiments d'exploitation de B.________, avant de faire un coude le long des champs pour accéder à sa parcelle (tracé rouge). Cet accès est nécessaire pour l'entretien de la parcelle et du verger (fauche de l'herbe, taille des arbres, traitements) et la cueillette des fruits. Ces tâches requièrent l'usage de machines, notamment d'un tracteur, parfois d'un véhicule léger, et de matériel (outil, faucheuse, remorque). 
 
C.  
Par décision du 8 février 2021, la Commission de classification du Syndicat d'améliorations foncières de Siviriez a maintenu l'assiette de la servitude telle que mise à l'enquête. Elle a estimé que le tracé proposé permettait un accès adéquat à la parcelle n° 155, dont la partie supérieure était accessible depuis le domaine public, et qu'il était disproportionné d'aménager un chemin "fondé" pour permettre d'accéder au bas de la parcelle par tout les temps avec un véhicule à deux roues motrices et d'exiger du propriétaire grevé un tracé passant entre les bâtiments ou au travers de ses parcelles planes attenantes, qui lui serait trop dommageable. 
Le 10 mars 2021, A.________ a recouru contre cette décision auprès de la Commission de recours en matière d'améliorations foncières de l'Etat de Fribourg. Il demandait que la servitude de passage dont son immeuble bénéfice soit précisée dans le sens du tracé rouge. A titre subsidiaire, il sollicitait, dans l'hypothèse où le tracé projeté par la Commission de classification était maintenu, une correction du dévers du chemin de servitude avec stabilisation du terrain et établissement de fondations, de sorte qu'il soit accessible en toute saison, à pied et pour tout véhicule. 
Lors de l'inspection des lieux du 13 août 2021, A.________ a proposé une variante alternative qui passe au nord des bâtiments de B.________, en traversant le verger implanté sur la parcelle n° 313 pour longer ensuite le pied du talus jusqu'à la parcelle n° 155 (tracé jaune). Il a précisé à cette occasion que l'usage de la servitude portait sur une vingtaine de passages par année aller et retour au maximum. Par la suite, il a produit un rapport établi le 30 septembre 2021 par le Service de prévention des accidents dans l'agriculture qui relève le caractère inadapté du passage de la route de Prez à la parcelle n° 313 et qui conclut que, pour garantir une sécurité optimale, avec tout type de véhicule et un chauffeur moins expérimenté, le cheminement prévu est à la limite de ce qui est acceptable, sans pouvoir le recommander. Interpellé, B.________ s'est opposé aux variantes proposées par A.________. 
 
 
 
La Commission de recours en matière d'améliorations foncières a rejeté le recours de A.________ en date du 16 septembre 2022. 
 
D.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public et du recours constitutionnel subsidiaire, A.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler cette décision et de renvoyer le dossier pour nouvelle décision à la Commission de classification du Syndicat d'améliorations foncières de Siviriez, le cas échéant à la Commission de recours en matière d'améliorations foncières. A titre plus subsidiaire, il conclut à ce que la servitude de passage, dont bénéficie la parcelle n° 155 à charge de la parcelle n° 313, soit précisée en ce sens qu'elle débute depuis la route de Prez, entre la ferme et les bâtiments sis sur la parcelle n° 313 et longe ensuite les champs jusqu'à l'extrémité est de la parcelle n° 155, à ce qu'un ingénieur-géomètre soit mandaté afin d'établir un plan qui sera déposé au registre foncier en tant que pièce justificative et à ce que les frais relatifs à ces modifications soient assumés solidairement par la Commission de classification, le Syndicat d'améliorations foncières de Siviriez et la Commune de Siviriez. A titre encore plus subsidiaire, il conclut à ce que la servitude de passage demeure telle qu'elle figure au registre foncier. 
Le Syndicat d'améliorations foncières de Siviriez n'a pas formulé d'observations. La Commission de classification et la Commission de recours concluent au rejet du recours. 
Invité à se déterminer, B.________ propose également de le rejeter. 
Le recourant a renoncé à déposer des observations complémentaires. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
La décision attaquée a été rendue dans une cause de droit public selon l'art. 82 let. a LTF en sorte qu'elle peut faire l'objet d'un recours en matière de droit public (art. 78 ss LTF). Le recours constitutionnel subsidiaire est de ce fait irrecevable (cf. art. 113 LTF). La Commission de recours en matière d'améliorations foncières a statué en dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 let. d LTF et art. 203 al. 3 de la loi fribourgeoise sur les améliorations foncières [LAF; RSF 917.1]). Elle présente les caractéristiques d'un tribunal supérieur au sens de l'art. 86 al. 2 LTF et satisfait aux exigences requises de toute autorité précédant immédiatement le Tribunal fédéral (arrêt 1C_533/2009 du 7 octobre 2010 consid. 1.1 à 1.3; sur ces exigences, voir ATF 136 II 470 consid. 1.1). Au surplus, le recours en matière de droit public a été interjeté par une partie à la procédure cantonale directement touchée par la décision entreprise et qui a un intérêt digne de protection à son annulation ou sa modification (art. 89 al. 1 LTF). Il a de plus été déposé en temps utile (art. 100 LTF) et en la forme prévue par la loi (art. 42 et 106 al. 2 LTF), de sorte qu'il est en principe recevable. 
 
2.  
Selon l'art. 112 LAF, la Commission de classification supprime, modifie ou crée les servitudes, les charges foncières et les droits personnels annotés, dans la mesure où ces opérations sont nécessaires à la réalisation du remaniement parcellaire. Le recourant ne conteste pas que cette disposition constitue une base légale suffisante pour modifier la servitude de passage qui grève la parcelle de l'intimé en sa faveur. Il soutient en revanche que la Commission de classification puis la Commission de recours ont versé dans l'arbitraire en considérant que l'intérêt public commandait de modifier l'assiette de la servitude existante, qui a été exercée sans problème particulier depuis sa constitution selon la tracé rouge, hormis quelques petites anicroches toujours présentes en droit du voisinage. Aucun indice indiquant un besoin de changement n'existe ou n'existait avant l'intervention du syndicat. L'absence d'un plan inscrit au registre foncier pour définir l'assiette de la servitude ne constitue pas un argument déterminant. Elle offre une certaine flexibilité en permettant au fonds dominant d'emprunter le tracé qui est le moins dommageable pour le fonds servant en fonction de l'utilisation effective des parcelles, qui peut se modifier avec les années (plantations ou pâturages). Le tracé de la servitude tel que décidé par la Commission de classification et la Commission de recours empêcherait l'agriculteur exploitant le fonds servant de faire des plantations sur ce champ, afin de laisser le passage libre pour l'accès au fonds dominant et ne serait aucunement compatible avec une utilisation judicieuse du sol ou une occupation rationnelle du territoire. Au contraire, le tracé utilisé jusqu'à ce jour et correspondant au tracé rouge serait respectueux des cultures, puisqu'il longe les champs de l'intimé. 
L'arrêt attaqué ne serait pas mieux fondé au regard du principe de la proportionnalité. Si la décision de faire figurer un plan au registre foncier indiquant le tracé de la servitude est en soit apte à atteindre le but visé, soit le fait de préciser la servitude, la décision attaquée ne respecte pas les critères de nécessité et de proportionnalité au sens étroit. La Commission de recours a apprécié les faits de manière arbitraire s'agissant du contenu du contrat constitutif de la servitude du 19 août 1947, en admettant que le tracé proposé par la Commission de classification correspondait au contrat de servitude. Si le contrat de base prévoit effectivement que la servitude longe l'ancien article 921b, soit la parcelle n° 155, il ne dit par contre pas par quel cheminement la servitude rejoint la route communale. Or, il est hautement probable que c'est un tracé moins abrupt qui a été envisagé à l'époque et non pas une voie d'accès en dévers, fortement pentue, s'agissant de desservir un dépôt de matériaux avec bâtiment. A l'examen des plans fournis par la Commission de classification dans sa réponse écrite du 3 mai 2021, on remarque que si l'on reproduit le tracé de la servitude comme le prévoit le contrat de base, en longeant l'article 921b et en prolongeant le cheminement d'une manière linéaire, plus ou moins en ligne droite, on peut rejoindre la route communale sans emprunter une pente abrupte. Ce cheminement ressemble au tracé jaune qu'il avait proposé, mais il passe alors juste devant le pont de grange (partie nord de la ferme de l'intimé). Si la Commission de classification ou la Commission de recours avaient réellement voulu rechercher la manière dont était exercée la servitude de base et appliquer les règles civiles en la matière, elles auraient dû demander au Registre foncier des plans de l'époque plus précis et rechercher d'éventuelles pièces justificatives supplémentaires. La manière dont cette servitude a été exercée jusque-là correspond au tracé rouge. Les propriétaires des fonds dominant et servant se sont accommodés de cet état de fait, qui constituait certainement, à une époque déterminée, la mesure présentant le moins d'inconvénients pour chacun d'entre eux. En déplaçant la servitude selon un tracé qui ne pourra pas être utilisé conformément au contrat de servitude et en écartant les autres tracés proposés à titre alternatif pour des motifs insoutenables, la Commission de recours aurait violé le droit fédéral, soit les art. 737 et 738 CC, et lésé la garantie de la propriété dont il peut se prévaloir. 
 
2.1. La garantie de la propriété est ancrée à l'art. 26 al. 1 Cst. Elle n'est toutefois pas absolue. Comme tout droit fondamental, elle peut être restreinte aux conditions fixées à l'art. 36 Cst. La restriction doit ainsi notamment être justifiée par un intérêt public (al. 2) et respecter le principe de la proportionnalité (al. 3). Ce principe exige qu'une mesure restrictive soit apte à produire les résultats escomptés (règle de l'aptitude), que ceux-ci ne puissent être atteints par une mesure moins incisive (règle de la nécessité) et qu'il existe un rapport raisonnable entre le but visé et les intérêts publics ou privés compromis (règle de la proportionnalité au sens étroit). Le Tribunal fédéral examine librement si une restriction de la propriété viole le principe de la proportionnalité. Il s'impose en revanche une certaine retenue quand il convient de tenir compte de circonstances locales dont les autorités cantonales ont une meilleure connaissance que lui (ATF 140 I 168 consid. 4.2.1; 135 I 176 consid. 6.1).  
Saisi d'un recours en matière de droit public, le Tribunal fédéral contrôle librement le respect du droit fédéral, qui comprend les droits de nature constitutionnelle (art. 95 let. a et 106 al. 1 LTF). Il ne revoit en revanche l'interprétation et l'application faite du droit cantonal que sous l'angle de l'arbitraire (ATF 144 I 170 consid. 7.3). Une décision ne peut être qualifiée de telle que si elle est manifestement insoutenable, méconnaît gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité; il ne suffit pas qu'une autre solution paraisse concevable, voire préférable; pour que cette décision soit annulée, encore faut-il qu'elle se révèle arbitraire non seulement dans ses motifs, mais aussi dans son résultat (ATF 148 II 106 consid. 4.6.1). 
 
2.2. L'art. 731 al. 1 CC prévoit que l'inscription au registre foncier est nécessaire pour la constitution des servitudes. A teneur de l'art. 732 CC, l'acte constitutif d'une servitude n'est valable que s'il a été passé en la forme authentique (al. 1). La servitude doit être dessinée sur un extrait de plan du registre foncier lorsque son exercice se limite à une partie de l'immeuble et que le lieu où elle s'exerce n'est pas décrit avec suffisamment de précision dans le titre (al. 2). L'art. 738 CC dispose que l'inscription au registre foncier fait règle, en tant qu'elle désigne clairement les droits et les obligations dérivant de la servitude (al. 1); l'étendue de celle-ci peut être précisée, dans les limites de l'inscription, soit par son origine, soit par la manière dont la servitude a été exercée pendant longtemps, paisiblement et de bonne foi (al. 2). Pour déterminer le contenu d'une servitude, il convient de procéder selon l'ordre des étapes prévu par l'art. 738 CC: le juge doit dès lors se reporter en priorité à l'inscription au registre foncier, c'est-à-dire à l'inscription au feuillet du grand livre; ce n'est que si celle-ci est peu claire, incomplète ou sommaire, que la servitude doit être interprétée selon son origine, à savoir d'après l'acte constitutif déposé comme pièce justificative au registre foncier (art. 948 al. 2 CC) et qui fait partie intégrante du registre foncier (art. 942 al. 2 CC). Si le titre d'acquisition ne permet pas de déterminer le contenu de la servitude, l'étendue de celle-ci peut alors être précisée par la manière dont elle a été exercée pendant longtemps, paisiblement et de bonne foi (art. 738 al. 2 CC; ATF 137 III 145 consid. 3.1 et 444 consid. 2.2).  
Dans la mesure où l'interprétation du contrat de servitude foncière est en cause, les règles générales d'interprétation des contrats du droit des obligations s'appliquent en principe (ATF 139 III 404 consid. 7.1). Dans les relations entre les parties contractantes initiales, c'est en premier lieu le but pour lequel la servitude a été constituée qui est déterminant. S'il n'est pas possible d'établir une réelle volonté des parties à ce sujet, le but doit être déterminé à partir du texte sur la base d'une interprétation objective en fonction des besoins du fonds dominant au moment de la constitution. Dans les rapports avec les tiers, le but déterminant est celui qui ressort du contrat de servitude lui-même ou qui est objectivement reconnaissable. Le motif d'acquisition doit être interprété comme il pouvait et devait être compris selon sa teneur et son contexte, ainsi que notamment sur la base des besoins du fonds dominant au moment de la constitution et compte tenu du sens et du but de la servitude (arrêt 5A_182/2022 du 10 août 2022 consid. 3.1). Toute servitude doit être interprétée restrictivement et ne doit limiter les droits du propriétaire du fonds servant que dans la mesure nécessaire à son exercice normal (ATF 113 II 506 consid. 8b; 109 II 412 consid. 3). 
 
2.3. Le souhait du recourant de laisser l'assiette de la servitude de passage indécise et au libre consentement mutuel des parties se heurte à l'art. 732 al. 2 CC, dans sa teneur actuelle entrée en vigueur postérieurement à son inscription au registre foncier, qui exige que la servitude figure sur un plan dans la mesure où il n'est pas possible de la déterminer avec suffisamment de précision à la lumière de la description donnée par le titre (Message concernant la révision du code civil suisse (Cédule hypothécaire de registre et autres modification des droits réels) du 27 juin 2007, FF 2007 p. 5029; arrêt 5A_873/2018 du 19 mars 2020 consid. 4.6). Si l'exercice de la servitude est limité à une partie de l'immeuble grevé, le contrat doit encore préciser l'assiette de la servitude, soit par un plan de géomètre, soit par tout autre moyen suffisant, tel qu'un plan privé ou une description par des mots. Le contenu de la servitude doit de plus être suffisamment clair non seulement pour les parties au contrat constitutif, mais également pour les tiers (arrêt 5A_641/2008 du 8 janvier 2008 consid. 4.1 in RNRF 2009 p. 308 ss). L'art. 732 al. 2 CC a codifié ces principes en précisant que la servitude doit être dessinée sur un extrait de plan du registre foncier lorsque son exercice se limite à une partie de l'immeuble et que le lieu où elle s'exerce n'est pas décrit avec suffisamment de précision dans le titre (cf. ATF 138 III 742 consid. 2.2). En l'occurrence, l'inscription au registre foncier se limite à indiquer l'existence d'un droit de passage, sans autres précisions quant à son tracé. L'acte de vente notarié constitutif de la servitude n'est guère plus précis si ce n'est que le droit de passage s'exerce "sur les art. 205b et 204ba, le long de l'art. 921b, en faveur de l'art. 921b, pour aboutir au chemin communal tendant à Prez-vers-Sivirez". Cela étant, au vu des exigences de l'art. 732 al. 2 CC, on ne saurait reprocher à la Commission de classification d'avoir précisé l'assiette de la servitude de passage litigieuse dans un plan dans le cadre du nouvel état de propriété et des servitudes.  
Pour le surplus, ni le recourant, ni B.________ n'étaient parties au contrat de vente constitutif de la servitude de passage inscrite au registre foncier le 19 septembre 1947. L'acte constitutif ne permet pas de déterminer précisément l'assiette de la servitude de passage (largeur et tracé exacts). Aucun plan n'a été établi par les parties lors de la constitution de la servitude ou ultérieurement. Par ailleurs, ni le dépôt de matériaux ni l'immeuble prévus dans l'acte de vente n'ont été réalisés. Cela étant, pour déterminer l'objectif poursuivi par la servitude et le tracé de celle-ci, il faut se référer à l'inscription ainsi qu'aux pièces justificatives telles que les parties pouvaient les comprendre, de bonne foi, lors de la conclusion de l'acte. 
L'inscription au registre foncier se limite, on l'a vu, à indiquer sans autre précision l'existence d'un droit de passage grevant la parcelle de l'intimé en faveur de la parcelle du recourant. L'acte de vente notarié constitutif de la servitude précise que le droit de passage s'exerce "sur les art. 205b et 204ba, le long de l'article 921b, en faveur de l'art. 921b, pour aboutir au chemin communal tendant à Prez-vers-Sivirez". L'accès à la parcelle n° 155, correspondant à l'ancien article 921b, devait ainsi s'exercer sur les articles 205b et 204ba, lesquels correspondent actuellement à la surface de la parcelle n° 313 qui s'étend au nord et à l'est des bâtiments d'exploitation de B.________. Le tracé bleu, retenu par la Commission de classification, et le tracé jaune entrent ainsi tous deux dans les voeux des cocontractants, contrairement au tracé rouge que le recourant emprunte actuellement pour se rendre sur sa parcelle et qu'il souhaiterait conserver selon les conclusions principales de son recours. 
Selon la jurisprudence, l'interprétation à l'aide de la manière dont la servitude a été exercée pendant longtemps, paisiblement et de bonne foi, n'intervient que si l'acte constitutif ne permet pas d'en préciser le contenu et l'étendue (ATF 137 III 145 consid. 3.1; arrêt 5A_697/2022 du 20 décembre 2022 consid. 4.3.1.1). Or, on peut constater que l'assiette de la servitude ne s'étendait pas aux parcelles qui accueillent les bâtiments de l'intimé et que le passage selon le tracé rouge s'est donc exercé à bien plaire. La Commission de recours n'est donc pas tombée dans l'arbitraire en ne recourant pas à ce troisième moyen d'interprétation, subsidiaire aux deux autres, pour déterminer l'assiette de la servitude. Le recourant ne saurait par ailleurs tirer parti du fait que les parcelles en question ont été réunies en une seule parcelle englobant les bâtiments de B.________ pour voir imposer l'assiette de la servitude selon le tracé rouge et s'affranchir de l'acte constitutif qui en arrête le tracé aux anciennes parcelles n os 205b et 204ba.  
La Commission de recours s'est assurée que la décision attaquée respectait les intérêts du propriétaire du fonds dominant et que le tracé retenu permettait à celui-ci d'accéder à la parcelle n° 155 pour assurer son entretien et son exploitation. Selon ses constatations, le contrat de vente conclu en août 1947 prévoyait certes que le fonds dominant était destiné à accueillir un dépôt de matériaux et un bâtiment; toutefois, le bâtiment n'avait jamais été construit et le recourant ne prévoyait pas qu'il serait en projet; il était au surplus peu probable qu'une autorisation de construire dans cette zone soit accordée au regard des règles de l'aménagement du territoire en vigueur. Aussi, la Commission de classification pouvait s'abstenir de tenir compte de cette affectation pour élaborer le tracé de la servitude et s'en tenir à l'usage effectivement fait du fonds dominant, en tenant compte de sa topographie. A ce sujet, elle a constaté, sans être contredite sur ce point, que la parcelle n° 155 était constituée d'un talus fort pentu, qu'elle avait récemment été arborisée et qu'elle ne pouvait pas être exploitée avec de grosses machines. Son exploitation ne nécessitait pas de nombreux allers et retours, le nombre de vingt trajets avancé par le recourant lors des débats semblant à cet égard surfait eu égard aux particularités de la parcelle. Le recourant pouvait accéder au bas de sa parcelle, dont la pente était moins prononcée, par le tracé contesté avec des machines adéquates, notamment pour y faire du foin. Les difficultés d'accès au fonds dominant par tous les temps et avec n'importe quel véhicule ne résultaient pas du tracé prévu mais de l'absence d'aménagements. Or, le haut de la parcelle était accessible par la route et il y avait un sens d'aménager un accès à cet endroit. Il appartenait au recourant de se rendre sur sa parcelle lorsque les conditions météorologiques sont favorables. Les critiques formulées par le recourant à l'égard de ces considérations ne permettent pas de les tenir pour insoutenables ou d'une autre manière non conformes au droit. 
Les agriculteurs composant la Commission de classification ont considéré que le tracé bleu, sans être idéal, n'était pas dangereux au point de devoir lui préférer l'un des deux autres tracés proposés par le recourant à titre alternatif. Les membres de la Commission de recours, dont un maître agriculteur, ont partagé ce point de vue sur la base des photographies et des plans figurant au dossier. La pente du tracé en long et en dévers, comprise entre 10 et 22%, n'était pas dangereuse en soi. Une inspection locale avait permis de le confirmer. La pente retenue dans le rapport du Service de prévention des accidents dans l'agriculture, estimée à environ 25%, n'était pas correcte. Par ailleurs, bien qu'ils ne recommandaient pas l'utilisation du cheminement prévu, leurs auteurs ne concluaient pas clairement à sa dangerosité, estimant qu'il était "à la limite de ce qui est acceptable". Aussi, les conclusions du Service de prévention des accidents dans l'agriculture, en raison de leur fondement imprécis et de leur formulation ambiguë, ne modifiaient pas l'appréciation de la Commission de recours. Dite appréciation, émanant de personnes spécialisées et fondée sur des éléments objectifs issus du dossier et d'une inspection locale, doit aussi être confirmée, faute pour le recourant de fournir des éléments convaincants permettant de douter de son bien-fondé. Certes, celui-ci a joint à son mémoire de recours un rapport de l'Association Fribourgeoise pour l'Equipement Technique de l'Agriculture (AFETA) rendu le 1 er mars 2023, qui aboutit à une conclusion divergente. La production de cette pièce devant le Tribunal fédéral n'est toutefois pas recevable dans la mesure où elle aurait pu être produite bien avant et n'est pas générée par l'arrêt attaqué (art. 99 al. 2 LTF); il est au demeurant rappelé que ce nouvel avis d'expert ne constitue qu'un simple allégué de partie, qui ne saurait être suivi inconditionnellement (cf. ATF 142 II 355 consid. 6; arrêt 1C_209/2022 du 25 août 2022 consid. 6.3.2). Quoi qu'il en soit, vu la retenue que s'impose le Tribunal fédéral dans l'examen des circonstances locales, l'appréciation des premiers juges, fondée sur une vision locale et les photographies versées au dossier, quant à la praticabilité de la servitude selon le tracé retenu par la Commission de classification n'apparaît pas insoutenable et peut dès lors être confirmée.  
La Commission de recours a ajouté qu'il était loisible au recourant d'aménager le tracé de manière à le rendre moins dangereux. Selon l'art. 737 al. 1 CC, celui à qui la servitude est due peut prendre toutes les mesures nécessaires pour la conserver et pour en user. Ainsi, le bénéficiaire d'un droit de passage a le droit de procéder, sur le fonds grevé, aux aménagements du sol nécessaires à la construction de l'accès (arrêt 5A_253/2008 du 22 août 2008 consid. 5, in RNRF 2009 p. 239). Il est néanmoins tenu d'exercer son droit de la manière la moins dommageable possible (art. 737 al. 2 CC). Corrélativement, le propriétaire du fonds servant doit souffrir toutes les atteintes à sa propriété qui sont nécessaires pour que la servitude puisse être exercée: il ne peut en aucune façon empêcher ou rendre plus incommode l'exercice de celle-ci (art. 737 al. 3 CC). La question de savoir si l'assiette de la servitude peut subir des aménagements pour la rendre praticable en tout temps peut demeurer indécise. La cour cantonale a relevé que l'usage de la servitude se résumait à une vingtaine de trajets par année pour l'entretien de la parcelle et la cueillette des fruits, de sorte que l'on peut attendre que ces tâches se fassent dans des conditions météorologiques favorables. Sur ce point, le recourant n'émet pas de critiques répondant aux exigences de motivation requises et se borne à affirmer que la servitude devrait pouvoir être exercée en tout temps, quelles que soient les conditions météorologiques. 
La Commission de recours n'a pas davantage erré en écartant les autres tracés proposés à titre de variante à celui retenu par la Commission de classification. Le tracé jaune prendrait certes place sur l'ancienne parcelle n° 205b. A ce titre, il entrerait dans les vues des cocontractants à l'acte de vente constitutif de la servitude de passage. En revanche, l'intimé s'est opposé à ce tracé au motif qu'il consacrait une emprise plus importante sur le fonds servant et qu'il traverse le verger qu'il exploite sur sa parcelle, nécessitant l'abattage de deux arbres. La Commission de recours a repris ces motifs à son compte et l'a aussi écarté pour des raisons liées à sa dangerosité dans son premier tronçon, que le recourant ne remet pas en cause. De ce point de vue, c'est sans arbitraire que le tracé jaune a été écarté. 
Quant au tracé rouge, dans la mesure où il s'écarte des vues des parties au contrat de servitude, il ne pouvait être adopté qu'avec le consentement de B.________ ou s'il devait s'avérer qu'un tracé au nord des bâtiments d'exploitation serait impraticable. L'intimé s'est opposé à ce tracé parce qu'il passait entre sa ferme et la villa de son fils et de sa famille, qu'il mettait en danger la sécurité de leurs occupants et qu'il consacrait une emprise bien plus importante sur le fonds servant que celui qui avait été retenu. La Commission de recours a partagé ce point de vue, ajoutant sans être contredite sur ce point que le tracé rouge comportait sur une partie de son tronçon une pente plus élevée que celle résultant du tracé litigieux. En outre, pour les raisons déjà précisées, elle pouvait retenir que le tracé bleu était praticable par beau temps et que l'exploitation de la parcelle n° 155 ne nécessitait pas un accès idéal par le bas pour un tracteur équipé d'une machine. 
En définitive, la solution retenue par la Commission de classification et entérinée sur recours par la Commission de recours est soutenable et n'appelle aucune intervention de la part du Tribunal fédéral compte tenu de la retenue dont il doit faire preuve en l'occurrence. 
 
3.  
Le recours en matière de droit public doit ainsi être rejeté dans la mesure où il est recevable, aux frais du recourant qui succombe (art. 65 et 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens à l'intimé qui a procédé seul, qui n'en réclame pas (ATF 135 III 127 consid. 4) et qui ne prétend pas avoir engagé des frais particuliers pour assurer la défense de ses intérêts devant le Tribunal fédéral (ATF 125 II 518 consid. 5b), ni aux autorités (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours constitutionnel subsidiaire est irrecevable. 
 
2.  
Le recours en matière de droit public est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
3.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
4.  
Il n'est pas alloué de dépens. 
 
5.  
Le présent arrêt est communiqué à la mandataire du recourant, à B.________, au Syndicat d'améliorations foncières de Siviriez, à la Commission de classification du Syndicat d'améliorations foncières de Siviriez et à la Commission de recours en matière d'améliorations foncières de l'Etat de Fribourg. 
 
 
Lausanne, le 1 er septembre 2023  
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Kneubühler 
 
Le Greffier : Parmelin