4A_500/2023 11.04.2024
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
4A_500/2023  
 
 
Arrêt du 11 avril 2024  
I  
 
Composition 
Mmes les Juges fédérales 
Jametti, Présidente, Kiss et May Canellas. 
Greffière : Mme Fournier. 
 
Participants à la procédure 
1. A.a.________, 
2. A.b.________, 
tous deux représentés par Me Carole Wahlen, avocate, 
demandeurs et recourants, 
 
contre  
 
1. B.a.________, 
2. B.b.________, 
tous deux représentés par Me Albert Habib, avocat, 
défendeurs et intimés. 
 
Objet 
bail; résiliation extraordinaire (art. 257f al. 3 CO), 
 
recours contre l'arrêt rendu le 7 septembre 2023 par la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud (XC21.053602-230139 n° 363). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. Par contrat de bail du 12 juillet 2007, B.c.________ et B.d.________, alors propriétaires, ont loué à A.a.________ et à C.________ un appartement de cinq pièces au rez-de-chaussée de l'immeuble sis (...) à U.________. Le bail a été conclu pour un loyer mensuel de 3'500 fr. et pour une durée initiale d'une année débutant le 1er août 2007. Il se renouvelait ensuite d'année en année, sauf avis de résiliation donné par l'une des parties au moins trois mois à l'avance.  
Par avenant du 15 février 2008, A.a.________ (ci-après : le locataire) est devenu le seul locataire de l'appartement. S'y est ensuite jointe A.b.________ (ci-après, prise avec A.a.________ : les locataires), par avenant du 22 décembre 2017. 
Par donation du 7 octobre 2020, B.a.________ et B.b.________ (ci-après: les bailleurs), enfants de B.c.________ et B.d.________, sont devenus copropriétaires de l'appartement. 
 
A.b. Le 24 avril 2021, une altercation a eu lieu entre le père des bailleurs et le locataire. A la suite de celle-ci, chaque protagoniste a déposé une plainte pénale contre l'autre.  
 
A.c. Le 6 mai 2021, les pompiers sont intervenus dans l'appartement des locataires en raison d'un départ de feu.  
Par lettre du 10 mai 2021, les locataires se sont notamment plaints de défauts touchant le système électrique de la cuisine de l'appartement, qui auraient, selon eux, déclenché l'incendie. Le courrier mentionnait également que les fenêtres de l'appartement étaient défectueuses. Les locataires indiquaient qu'ils consigneraient le loyer si les bailleurs ne remédiaient pas aux défauts dans le délai imparti. Enfin, les locataires requéraient une réduction de loyer pour la période courant de 2013 jusqu'à la suppression des défauts. 
Par pli du 26 mai 2021, les bailleurs ont relevé qu'il incombait aux locataires d'assurer l'entretien des fenêtres et ont mis ces derniers en demeure de s'exécuter. 
En juin 2021, les locataires se sont plaints de défauts supplémentaires, notamment de l'apparition de fourmis et d'une panne de lave-vaisselle ayant impliqué l'intervention de professionnels. 
Le 17 juin 2021, les locataires ont encore fait état de défauts affectant la porte d'entrée et d'autres causés par l'humidité dégagée de la salle de bain. Les locataires ont, à nouveau, imparti aux bailleurs un délai pour procéder à la réfection de ces défauts, requis une réduction de loyer et menacé de consigner le loyer. 
 
A.d. Par lettre du 28 juillet 2021, les locataires ont informé les bailleurs qu'ils avaient consigné le loyer du mois d'août 2021.  
 
A.e. Par courrier du 11 août 2021, les bailleurs ont notamment requis que les locataires confirment avoir réalisé les travaux d'entretien des fenêtres demandés. Ils les ont en outre sommés de leur remettre une attestation établissant l'existence d'une assurance responsabilité civile, au plus tard le 1er septembre 2021. A l'appui de cette demande, les bailleurs évoquaient les dégâts de l'appartement dont les locataires s'étaient récemment plaints. Ils indiquaient également vouloir procéder, directement auprès de l'assurance, au recouvrement d'un prétendu dommage survenu en 2018. Ce courrier a été distribué aux locataires le 13 août 2021.  
 
A.f. Par requête du 25 août 2021 déclarée non conciliée, les locataires ont saisi la commission de conciliation en concluant à la remise en état de la chose louée et à la validation de la consignation du loyer.  
 
A.g. Par formules officielles du 6 septembre 2021, les bailleurs ont résilié le contrat de bail des locataires pour le 31 octobre 2021, sans indiquer de motif de résiliation.  
 
A.h. Par pli du 30 septembre 2021 faisant suite à une requête en renseignements fiscaux, l'administration cantonale des impôts a informé les bailleurs que le locataire détenait une fortune imposable de 381'000 fr. en 2019.  
 
B.  
 
B.a. Par requête introduite le 1er octobre 2021 auprès de la commission de conciliation, déclarée non conciliée puis portée le 16 décembre 2021 auprès du Tribunal des baux du canton de Vaud, les locataires ont notamment conclu à la constatation de la nullité et de l'inefficacité du congé, subsidiairement à son annulation et, plus subsidiairement, à une prolongation de bail de quatre ans.  
Les bailleurs ont précisé que le congé avait été signifié en application de l'art. 257f al. 3 CO, à la suite de la mise en demeure du 11 août 2021 à laquelle les locataires n'avaient pas donné suite. 
Lors de l'audience du 28 juin 2022, les locataires ont produit une attestation de leur assurance responsabilité civile valable dès le 5 décembre 2011. 
Par jugement du 28 juin 2022 "rectifié" le 29 décembre 2022, le Tribunal des baux a annulé la résiliation du bail. 
 
B.b. Statuant le 7 septembre 2023 sur appel des bailleurs, la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal vaudois a partiellement admis l'appel et déclaré valable et efficace la résiliation de bail extraordinaire du 6 septembre 2021.  
 
C.  
Les locataires ont interjeté un recours en matière civile au Tribunal fédéral à l'encontre de cet arrêt. En substance, ils ont conclu à sa réforme, principalement en ce sens que la résiliation du bail soit déclarée inefficace et subsidiairement annulée. Plus subsidiairement, ils ont sollicité l'annulation de la décision entreprise et le renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
Les bailleurs ont conclu à la "confirmation de la résiliation du bail du 6 septembre 2021" et au rejet du recours. 
L'autorité précédente s'est référée aux considérants de son arrêt. 
Par ordonnance présidentielle du 21 novembre 2023, l'effet suspensif a été conféré au recours, faute d'opposition. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Interjeté en temps utile (art. 100 al. 1 et art. 45 al. 1 LTF) par les locataires qui ont succombé dans leurs conclusions (art. 76 al. 1 LTF) et dirigé contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu sur appel par un tribunal cantonal supérieur (art. 75 LTF) dans une affaire de contestation du congé extraordinaire d'un bail (art. 72 al. 1 LTF), dont la valeur litigieuse atteint le seuil de 15'000 fr. requis en la matière (art. 74 al. 1 let. a LTF), le recours en matière civile est recevable au regard de ces dispositions. Demeure réservée, à ce stade, la recevabilité des griefs soulevés par les recourants. 
 
2.  
 
2.1. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut rectifier ou compléter les constatations de l'autorité précédente que si elles sont manifestement inexactes ou découlent d'une violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). "Manifestement inexactes" signifie ici "arbitraires" (ATF 140 III 115 consid. 2; 135 III 397 consid. 1.5). Encore faut-il que la correction du vice soit susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).  
La critique de l'état de fait retenu est soumise au principe strict de l'allégation énoncé par l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 140 III 264 consid. 2.3 et les références). La partie qui entend attaquer les faits constatés par l'autorité précédente doit expliquer clairement et de manière circonstanciée en quoi les conditions précitées seraient réalisées (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1 et les références). Si elle souhaite obtenir un complètement de l'état de fait, elle doit aussi démontrer, par des renvois précis aux pièces du dossier, qu'elle a présenté aux autorités précédentes en conformité avec les règles de procédure les faits juridiquement pertinents à cet égard et les moyens de preuve adéquats (ATF 140 III 86 consid. 2). Si la critique ne satisfait pas à ces exigences, les allégations relatives à un état de fait qui s'écarterait de celui de la décision attaquée ne pourront pas être prises en considération (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1 et les références). 
En matière d'appréciation des preuves, il y a arbitraire lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables. L'arbitraire ne résulte pas du seul fait qu'une autre solution serait envisageable, voire préférable (ATF 136 III 552 consid. 4.2). 
 
2.2. Selon les recourants, les faits seraient entachés d'arbitraire, respectivement devraient être complétés sur plusieurs aspects.  
 
2.2.1. Tout d'abord, ils reprochent à la cour cantonale d'avoir méconnu que les bailleurs connaissaient leur situation financière aisée avant qu'ils ne résilient le contrat de bail.  
La cour cantonale a constaté que les bailleurs n'avaient appris quelle était la situation financière des locataires qu'après avoir résilié le bail dont ces derniers étaient titulaires (cf. arrêt attaqué, p. 14, consid. 3.3). Aucun des éléments avancés par les locataires ne permet de considérer qu'elle aurait, ce faisant, versé dans l'arbitraire. Ainsi, les juges cantonaux n'ont pas méconnu que l'administration fiscale avait communiqué aux bailleurs le montant de la fortune du/des locataire/s; cela étant, cette communication était intervenue le 30 septembre 2021, soit après que le bail ait été résilié. A cela s'ajoutait que les renseignements qui leur avaient été délivrés par le fisc remontaient à l'année 2019 et que rien ne certifiait que la situation de fortune des locataires soit demeurée inchangée près de deux ans plus tard. N'en déplaise à ceux-ci, la détention de deux véhicules automobiles n'en apporte pas la démonstration éclatante. Pour finir, les bailleurs n'ont pas allégué en procédure qu'ils connaissaient la situation financière des locataires avant de résilier le bail, ce qui clôt ce chapitre. 
 
2.2.2. Ensuite, les recourants avancent que les bailleurs savaient qu'ils étaient en vacances au moment de l'envoi du courrier du 11 août 2021 (cf. supra let. A.e), sans toutefois se conformer aux exigences applicables en matière de complètement de l'état de fait (art. 106 al. 2 LTF). Ce grief est donc irrecevable.  
 
2.2.3. Les recourants soulignent enfin le passage suivant de l'arrêt cantonal : "en réalité, on ne peut pas exclure que les bailleurs aient voulu (...) "se débarrasser" de leurs locataires". Certes, cette formulation n'est pas des plus heureuses, mais elle n'a pas valeur de fait. A supposer que les recourants entendent ainsi remettre en cause le motif du congé, qui relève du fait (ATF 148 III 215 consid. 3.1.4; 145 III 143 consid. 3.1; arrêt 4A_431/2022 du 28 février 2023 consid. 5.1), leur démarche se heurterait aux exigences de l'art. 106 al. 2 LTF qui ne sont pas satisfaites.  
Ainsi, il y a lieu de se fonder exclusivement sur les faits retenus par la cour cantonale. 
 
3.  
Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Compte tenu de l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, sous peine d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 let. b LTF), il n'examine en principe que les griefs invoqués, sauf en cas d'erreurs juridiques manifestes. Il n'est pas tenu de traiter, comme le ferait une autorité de première instance, toutes les questions juridiques qui pourraient se poser, lorsque celles-ci ne sont plus discutées devant lui (ATF 140 III 86 consid. 2; 137 III 580 consid. 1.3). Par exception à la règle selon laquelle il applique le droit d'office, il n'examine la violation d'un droit constitutionnel que si le grief a été invoqué et motivé de façon détaillée (art. 106 al. 2 LTF; 137 III 580 consid. 1.3; 135 III 397 consid. 1.4). 
 
4.  
Les parties ont été liées par un contrat de bail auquel les bailleurs ont mis fin le 6 septembre 2021 pour le 31 octobre suivant (cf. supra let. Ag) en se prévalant de l'art. 257f al. 3 CO. La Cour d'appel civile a estimé que ce congé était efficace au regard de cette disposition. Le locataire avait l'obligation de contracter une assurance couvrant la responsabilité civile concernant le bail et d'en apporter la preuve au bailleur, en lui fournissant une attestation. Dans le cas présent, les locataires n'avaient pas fourni l'attestation nécessaire, en dépit d'un avertissement en bonne et due forme. Il s'agissait d'une violation grave du contrat de bail, sanctionnée à bon droit d'une résiliation anticipée. La cour cantonale a en outre considéré qu'un congé extraordinaire qui remplit les conditions de l'art. 257f al. 3 CO n'est pas annulable selon les art. 271 et 271a CO : on ne saurait retenir, selon son expression, qu'une partie remplit les conditions d'un droit qu'elle peut faire valoir (soit la résiliation extraordinaire), tout en lui reprochant d'être de mauvaise foi (cf. arrêt attaqué, p. 19, consid. 4.3).  
 
5.  
Les recourants dénoncent principalement une violation de l'art. 257f al. 3 CO
A l'appui de leur moyen, ils contestent que leur refus de fournir aux bailleurs une attestation établissant l'existence d'une assurance responsabilité civile constituerait une violation de leur devoir de diligence propre à justifier une résiliation extraordinaire. En outre, ils reprochent à l'autorité précédente d'avoir admis la validité de l'avertissement qui leur a été signifié le 11 août 2021. Celui-ci ne répondrait pas aux exigences légales, en raison de son manque de clarté, de l'absence de menace de résiliation, de la date à laquelle il a été notifié (en plein mois d'août), du délai insuffisant qui était imparti et de l'absence d'avertissements supplémentaires. Les recourants relèvent encore que la Cour d'appel civile n'aurait pas dû considérer qu'ils avaient persisté à violer leur obligation contractuelle suite à l'avertissement, étant donné qu'ils n'auraient pas eu le temps de s'exécuter. Ils prétendent enfin que les juges cantonaux auraient admis à tort que le maintien du bail était insupportable pour les bailleurs. En particulier, ils soutiennent qu'aucun sinistre récent ne justifiait que ceux-ci s'inquiètent de leur assurance responsabilité civile. 
 
5.1. Aux termes de l'art. 257f al. 3 CO, lorsque le maintien du bail est devenu insupportable pour le bailleur ou les personnes habitant la maison parce que le locataire, nonobstant une protestation écrite du bailleur, persiste à enfreindre son devoir de diligence ou à manquer d'égards envers les voisins, le bailleur peut résilier le contrat avec effet immédiat; les baux d'habitation et de locaux commerciaux peuvent être résiliés moyennant un délai de congé minimum de 30 jours pour la fin d'un mois.  
Cette disposition vise un cas particulier d'inexécution des obligations, spécifique à la relation entre bailleur et locataire, et en règle les effets. Dans son domaine de validité, elle exclut l'application des règles générales de l'art. 107 CO relatif aux droits de la partie qui ne parvient pas à obtenir le respect d'un contrat (ATF 132 III 109 consid. 5; arrêts 4A_468/2020 du 9 février 2021 consid. 4.1; 4A_347/2016 du 10 novembre 2016 consid. 3.1.1). 
La résiliation prévue par l'art. 257f al. 3 CO suppose la réalisation des cinq conditions cumulatives suivantes : une violation du devoir de diligence incombant au locataire, un avertissement écrit préalable du bailleur, la persistance du locataire à ne pas respecter son devoir en relation avec le manquement évoqué par le bailleur dans sa protestation, le caractère insupportable du maintien du contrat pour le bailleur et, enfin, le respect d'un préavis de trente jours pour la fin d'un mois (arrêts 4A_468/2020 précité, ibidem; 4A_457/2013 du 4 février 2014 consid. 2 et les arrêts cités). Dans le cas présent, les quatre premières conditions requièrent un développement. 
 
5.1.1. Tout d'abord, le comportement du locataire doit constituer une violation de son devoir de diligence ou un usage de la chose violant les stipulations du contrat (ATF 132 III 109 consid. 5; 123 III 124 consid. 2a). Le manquement reproché au locataire doit atteindre une certaine gravité (ATF 134 III 300 consid. 3.1 p. 304).  
A teneur de l'art. 5 RULV (Dispositions paritaires romandes et règles et usages locatifs du canton de Vaud) qui correspond à l'art. 6 du contrat-cadre romand de baux à loyer, le locataire a l'obligation de contracter une assurance couvrant la responsabilité civile qu'il assume du fait du bail. Ainsi, il est également tenu d'apporter au bailleur la preuve qu'il en a conclu une, en lui en fournissant une attestation (arrêt 4A_468/2020 précité consid. 4.1.1). 
Le manquement du locataire qui omet de conclure une assurance responsabilité civile ou qui refuse d'en transmettre une attestation expose le bailleur à un risque de dommage important et revêt par conséquent un caractère grave qui justifie une résiliation anticipée fondée sur l'art. 257f al. 3 CO. La violation du contrat est réalisée indépendamment de la survenance d'un dommage (arrêt 4A_468/2020 précité consid. 4.1.1). 
 
5.1.2. L'application de l'art. 257f al. 3 CO requiert un avertissement écrit du bailleur. L'avertissement doit indiquer précisément quelle violation est reprochée au locataire, afin que celui-ci puisse rectifier son comportement (arrêts 4A_655/2017 du 22 février 2018 consid. 3; 4A_263/2011 du 20 septembre 2011 consid. 3.2; cf. aussi David Lachat/François Bohnet, in Commentaire romand, Code des obligations I, 3e éd. 2021, n° 10 ad art. 257f CO; Peter Higi/Anton Bühlmann, in Zürcher Kommentar, 5e éd. 2019, n° 51 ad art. 257f CO; David Lachat, Le bail à loyer, 2019, p. 887 n° 3.1.7). L'avertissement n'a toutefois nul besoin de contenir une menace de résiliation (arrêt 4C.270/2001 du 26 novembre 2001 consid. 3a; cf. aussi Lachat/Bohnet, op. cit., n° 10 ad art. 257f CO; Higi/Bühlmann, op. cit., n° 51 ad art. 257f CO; Pierre Wessner, in Commentaire pratique, Droit du bail à loyer et à ferme, 2e éd. 2017, n° 34 ad art. 257f CO; Lachat, op. cit., p. 887 n° 3.1.7).  
 
5.1.3. L'application de l'art. 257f al. 3 CO suppose encore que le locataire persiste à violer le contrat.  
 
5.1.4. Enfin, le maintien du contrat doit être insupportable pour le bailleur. Cette question doit être résolue à la lumière de toutes les circonstances du cas d'espèce, antérieures à la résiliation du bail. Elle relève du pouvoir d'appréciation du juge (art. 4 CC), raison pour laquelle le Tribunal fédéral n'intervient que si l'autorité cantonale a abusé de ce pouvoir (ATF 136 III 65 consid. 2.5).  
Lorsque la violation du contrat est grave, le maintien du bail est d'emblée insupportable pour le bailleur (ATF 134 III 300 consid. 3.1 p. 304; arrêt 4A_468/2020 précité consid. 4.1.2). Il en va donc ainsi lorsque le locataire omet de contracter une assurance responsabilité civile ou d'en transmettre une attestation à son bailleur (arrêt 4A_468/2020 précité, ibidem et consid. 4.2). 
 
5.2. En l'espèce, les locataires étaient tenus de conclure une assurance couvrant leur responsabilité civile concernant le bail, ce qu'ils ne contestent nullement. Sommés par les bailleurs de leur remettre l'attestation corrélative, par courrier du 11 août 2021, ils leur ont opposé un refus passif, ce qu'ils ne remettent pas non plus en cause. Au vu de la jurisprudence précitée, ils ont, par cette attitude, gravement violé leur devoir de diligence.  
S'agissant de la validité de l'avertissement donné par les bailleurs, l'autorité précédente n'a pas violé le droit fédéral en estimant que celui-ci était suffisamment clair. Dans leur courrier du 11 août 2021 (cf. supra let. A.e), les bailleurs ont en effet désigné sans ambiguïté le document qu'ils requéraient et le délai dans lequel il devait leur être remis, à savoir le 1er septembre 2021. Le fait que l'avertissement ne contenait pas de menace de résiliation n'affecte pas sa validité. Il n'en va pas autrement de sa notification en août - période que les locataires ont d'ailleurs mise à profit pour saisir l'autorité de conciliation - ainsi que du délai imparti pour s'exécuter, qui n'était pas trop court, n'en déplaise aux locataires qui n'ont même pas pris la peine de s'exécuter ultérieurement, à tout le moins pas avant de se retrouver en procédure. Contrairement à ce que les recourants soutiennent, cet avertissement n'avait pas besoin d'être précédé d'une autre mise en demeure ou réitéré. L'on voit d'ailleurs mal ce qu'une autre interpellation aurait changé puisque les locataires ont attendu près d'une année pour fournir le document voulu, à savoir lors de l'audience du 28 juin 2022 (cf. supra let. Ba).  
Enfin, concernant la quatrième condition, la cour de céans ne discerne pas en quoi la Cour d'appel civile aurait violé le droit fédéral, notamment abusé de son pouvoir d'appréciation, en retenant que le maintien du contrat était insupportable pour les bailleurs. En particulier, l'élément dont la Cour d'appel civile n'aurait pas tenu compte, selon les recourants, soit le fait qu'aucun sinistre ne soit survenu récemment, ne suffit pas pour conclure à un abus du pouvoir d'appréciation; la survenance d'un dommage n'est en effet pas une condition de l'art. 257f al. 3 CO
Mal fondé, ce grief doit être rejeté. 
 
6.  
Les recourants se plaignent également d'une violation des art. 271 et 271a CO
 
6.1. En substance, ils reprochent à la cour cantonale d'avoir faussement déduit de l'arrêt 4A_468/2020 du 9 février 2021 qu'un congé donné conformément à l'art. 257f al. 3 CO ne peut être annulé sur la base des art. 271 et 271a CO. Fondés sur un fait dont ils ont dénoncé l'arbitraire (cf. supra consid. 2.2.3), ils affirment que le congé aurait en réalité été donné en raison du conflit qui animait les parties et des prétentions qu'ils avaient émises en lien avec des défauts de l'appartement (art. 271a al. 1 let. a CO). Le fait que les bailleurs n'aient pas requis d'attestation durant les quatorze années de relation contractuelle illustrerait leur mauvaise foi: leur requête tardive serait purement chicanière. Les recourants relèvent enfin qu'il existerait une claire disproportion entre les intérêts des parties, laquelle dénoterait un congé abusif.  
 
6.2.  
 
6.2.1. Sur le principe, un congé extraordinaire fondé sur l'art. 257f al. 3 CO demeure annulable sur la base des art. 271 et 271a CO; l'art. 271a al. 3 let. c CO ne prévoit une exception que dans les cas prévus à l'art. 271a al. 1 let. d et e CO, ce qui est suffisamment explicite. Il n'en demeure pas moins qu'il faut des circonstances particulières pour qu'un congé fondé sur l'art. 257f al. 3 CO soit annulé; pareille annulation ne sera que très rarement admise si le congé respecte les conditions de l'art. 257f CO (arrêt 4A_87/2012 du 10 avril 2012 consid. 6.2; cf. aussi Lachat/Bohnet, op. cit., n° 11 ad art. 257f CO et n° 3 ad art. 271 CO; Higi/Bühlmann, in Zürcher Kommentar, 5e éd. 2022, n° 25 ad art. 271 CO; Lachat, op. cit., p. 948 n° 1.5). Si le consid. 5 de l'arrêt 4A_468/2020, auquel se réfère l'arrêt entrepris, ne le rappelle pas in extenso, il n'a pas pour autant opéré un revirement en la matière. Le grief corrélatif, dépourvu de toute substance, y avait d'ailleurs été écarté en une seule phrase.  
 
6.2.2. Le point de savoir si le congé contrevient aux règles de la bonne foi est une question de droit que le Tribunal fédéral revoit librement (ATF 148 III 215 consid. 3.1.4; arrêt 4A_431/2022 précité consid. 5.1).  
 
6.3. In casu, les conditions d'un congé prématuré selon l'art. 257f al. 3 CO étaient réunies, ce qui ne permettait pas d'exclure qu'il soit annulable au regard des art. 271 et 271a CO (les let. d et e de l'art. 271a al. 1 CO étant exceptées). Toutefois, la cour cantonale a constaté d'une manière qui lie le Tribunal fédéral que le congé avait été donné en raison du défaut d'attestation d'assurance responsabilité civile que les locataires s'étaient engagés à souscrire. Il n'a donc pas été donné en raison de défauts dont les locataires s'étaient plaints et dont la responsabilité incomberait, par hypothèse, aux bailleurs. Ceci permet déjà d'exclure le cas de figure visé par l'art. 271a al. 1 let. a CO. Quant aux circonstances particulières qui, selon les recourants, dénoteraient la mauvaise foi des bailleurs au sens de l'art. 271 CO, elles n'ont pas la consistance nécessaire. Il n'y a rien dans les éléments de fait constatés souverainement par la cour cantonale qui aurait valeur d'exception et rendrait le congé abusif.  
Il n'y a dès lors aucune violation du droit fédéral qui entache l'arrêt cantonal sur ce dernier point non plus. 
 
7.  
Au vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté, dans la mesure où il est recevable. 
Les recourants, qui succombent, supportent solidairement entre eux les frais judiciaires (art. 66 al. 1 et 5 LTF) et sont condamnés solidairement à verser aux intimés, créanciers solidaires, une indemnité à titre de dépens (art. 68 al. 1, 2 et 4 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 5'000 fr., sont mis à la charge des recourants, solidairement entre eux. 
 
3.  
Les recourants sont condamnés, solidairement entre eux, à verser aux intimés, créanciers solidaires, une indemnité de 6'000 fr. à titre de dépens. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 11 avril 2024 
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jametti 
 
La Greffière : Fournier