6B_152/2022 30.11.2022
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_152/2022  
 
 
Arrêt du 30 novembre 2022  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
Mme et MM. les Juges fédéraux 
Denys, Juge présidant, van de Graaf et Hurni. 
Greffier : M. Rosselet. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représentée par Me Léonard Micheli-Jeannet, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
Ministère public de la République et canton de Genève, 
route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy, 
intimé. 
 
Objet 
Ordonnance de non-entrée en matière (infraction à 
la LCD); droit d'être entendu; délai de plainte, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale 
de recours, du 22 décembre 2021 
(P/19567/2021 ACPR/916/2021). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Par ordonnance du 12 octobre 2021, le Ministère public de la République et canton de Genève a refusé d'entrer en matière sur la plainte formée par A.________ le 8 octobre 2021 contre B.________, société de protection juridique. 
 
B.  
Par arrêt du 22 décembre 2021, la Chambre de recours de la Cour de justice genevoise, statuant sur recours de A.________, l'a rejeté. 
En substance, la cour cantonale a retenu les faits suivants, s'agissant de l'infraction de concurrence déloyale encore contestée en procédure fédérale. 
 
B.a. Dans sa plainte du 8 octobre 2021, A.________ exposait qu'elle disposait de dix jours pour former appel contre un jugement du tribunal de police lui infligeant une amende. Ayant besoin d'être conseillée et défendue, elle avait, dans l'urgence, contacté B.________, qui lui avait fait signer un contrat d'assistance juridique. Toutefois, faute d'appel annoncé dans le délai, le jugement était entré en force. La société n'avait pas " tenu " les promesses qui lui avaient été faites lors de la signature du contrat, ni celles ressortant de sa publicité " tapageuse ". Elle s'était sentie flouée, trompée et était en colère. Elle sollicitait l'ouverture d'une instruction pénale et laissait la qualification juridique des faits à l'appréciation de l'autorité.  
 
B.b. Par courriel du 11 mai 2021, A.________ avait retourné le contrat dûment signé à B.________ et l'avait informée avoir donné l'ordre à sa banque de payer la cotisation demandée. Elle expliquait, à cette occasion, avoir transmis, à une conseillère, les explications relatives à son cas et avoir envoyé les pièces utiles, " vu l'urgence ". Divers échanges entre A.________ et B.________ s'en étaient suivis, au cours desquels la prénommée s'était notamment enquise de la prise en charge de son cas et avait fait part de son inquiétude quant à l'échéance prochaine du délai pour annoncer l'appel.  
Après avoir été informée le 18 mai 2021 de ce qu'elle avait manqué le délai de recours, A.________ s'était adressée à la direction de B.________ et avait demandé le remboursement de sa cotisation. Le 20 mai 2021, la société avait rejeté sa demande, considérant avoir respecté l'ensemble des conditions contractuelles. A.________ avait répondu: " [v] ous n'avez rien respecté Monsieur! Si cela avait été le cas j'aurais été contactée à temps par un juriste ce que vous n'avez pas fait, étant au courant de tout depuis votre bureau... selon votre mail du 18 crt. Ce sera notre échange de courriel, mes démarches auprès de votre secrétariat, contre vos arguments fallacieux devant une plainte pénale auprès du procureur. Je n'aurais pas besoin de votre publicité mensongère pour cette démarche! "  
 
B.c. Dans son ordonnance du 12 octobre 2021, le ministère public retenait que les faits dénoncés s'inscrivaient dans le cadre d'un litige civil. En vertu du principe de subsidiarité, il n'appartenait pas à l'autorité pénale d'intervenir dans des litiges d'une autre nature, les dispositions du droit civil étant à même d'assurer une protection suffisante à la recourante. Il était donc décidé de ne pas entrer en matière, les faits n'étant pas constitutifs d'une infraction pénale.  
 
B.d. Dans le cadre du recours cantonal, A.________ avait allégué que, de par la communication déployée par la société, constitutive de publicité mensongère, elle avait été induite en erreur sur le fait qu'elle allait, par la conclusion du contrat, mandater un avocat et voir sa situation prise en charge rapidement par des personnes compétentes. Cette erreur avait été provoquée par les informations mises en évidence sur le site internet de B.________, promettant une prise en charge " à 360° " allant au-delà de la simple assistance juridique, notamment en droit pénal, ainsi qu'un accompagnement illimité. Il était aussi fait mention d'une disponibilité et d'une réactivité qui faisaient la différence. Les faits dénoncés auraient donc dû être analysés sous l'angle notamment de la LCD (RS 241).  
Quant au ministère public, celui-ci indiquait que, s'agissant d'une éventuelle infraction à la LCD, rien ne permettait de considérer que la société avait donné à A.________ des indications inexactes ou fallacieuses au sens de l'art. 3 al. 1 let. b LCD ou qu'elle avait porté ou utilisé des titres ou des dénominations professionnelles inexactes, de nature à faire croire à des distinctions ou capacités particulières au sens de la let. c de la même disposition, en particulier qu'elle se serait présentée comme une étude d'avocats. 
 
C.  
A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 22 décembre 2021. Elle conclut, avec suite de frais et dépens, à l'annulation de l'arrêt attaqué et à sa réforme en ce sens que l'ordonnance de non-entrée en matière du 12 octobre 2021 est annulée et la cause renvoyée au ministère public afin qu'il ouvre une instruction pénale. Subsidiairement, elle conclut à l'annulation de l'arrêt querellé et au renvoi de la cause à la cour cantonale. En outre, elle sollicite l'assistance judiciaire. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le Tribunal examine d'office (art. 29 al. 1 LTF) et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 146 IV 185 consid. 2 p. 188). 
Dans la mesure où les griefs se rapportent à la motivation de la cour cantonale par laquelle elle a jugé la plainte tardive, en application de l'art. 31 CP, la recourante dispose de la qualité pour recourir fondée sur l'art. 81 al. 1 let. a et b ch. 6 LTF, qui prévoit que la partie plaignante a qualité pour former un recours en matière pénale lorsque la contestation porte sur le droit de porter plainte (cf. arrêt 6B_1029/2020 du 5 octobre 2021 consid. 1). 
 
2.  
La recourante invoque une violation de son droit d'être entendu en ce sens que la cour cantonale aurait adopté une motivation juridique totalement inattendue sur la problématique du délai de plainte, sans l'inviter à se déterminer, alors que ce point n'avait pas été abordé par le ministère public. 
 
2.1. Compris comme l'un des aspects de la notion générale de procès équitable ancrée à l'art. 29 Cst., le droit d'être entendu au sens de l'art. 29 al. 2 Cst. (cf. aussi art. 6 par. 1 CEDH; art. 3 al. 2 let. c CPP et 107 CPP), englobe notamment le droit pour l'intéressé de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situation juridique (ATF 145 I 167 consid. 4.1 p. 170 s.; 143 IV 380 consid. 1.1 p. 382). Ce droit se rapporte avant tout à la constatation des faits. Le droit des parties d'être interpellées sur des questions juridiques n'est reconnu que de manière restreinte, lorsque l'autorité concernée entend se fonder sur des normes légales dont la prise en compte ne pouvait pas être raisonnablement prévue par les parties, lorsque la situation juridique a changé ou lorsqu'il existe un pouvoir d'appréciation particulièrement large. Le droit d'être entendu ne porte en principe pas sur la décision projetée. L'autorité n'a donc pas à soumettre par avance aux parties, pour prise de position, le raisonnement qu'elle entend tenir (ATF 145 I 167 consid. 4.1 p. 171 et les références citées). Toutefois, lorsqu'elle envisage de fonder sa décision sur une norme ou un motif juridique non évoqué dans la procédure antérieure et dont aucune des parties en présence ne s'est prévalue et ne pouvait supputer la pertinence, le droit d'être entendu implique de donner au justiciable la possibilité de se déterminer à ce sujet (ATF 145 IV 99 consid. 3.1 p. 109; 145 I 167 consid. 4.1 p. 171 et les références citées; arrêts 6B_1272/2021 du 28 avril 2022 consid. 3.1; 6B_1029/2020 du 5 octobre 2021 consid. 2.1).  
 
2.2. La cour cantonale a retenu que les actes que la recourante prétendait constitutifs d'infractions à la LCD avaient été achevés, au plus tard, le 20 mai 2021, soit lorsque la société avait refusé sa demande de remboursement de la cotisation. Dans sa réponse du même jour, la recourante avait informé le directeur de son intention de déposer plainte contre elle en raison de leur différend. Ainsi, elle ne pouvait soutenir que c'était une consultation subséquente avec un avocat qui aurait levé le doute sur la punissabilité du comportement prêté à la mise en cause ou qui lui aurait fait prendre conscience qu'elle avait pu avoir été victime d'une infraction, ce d'autant plus qu'elle s'était, à cette occasion, déjà plainte au directeur de " publicité mensongère ". L'état de fait était donc suffisamment clair pour la recourante depuis le 20 mai 2021. Sa plainte pénale du 8 octobre 2021 s'avérait ainsi tardive et le ministère public n'avait pas à entrer en matière. Dans son résultat, l'ordonnance du 12 octobre 2021 apparaissait conforme au droit (cf. arrêt attaqué, consid. 2.6 p. 7).  
 
2.3. En l'espèce, il est constant, à la lecture de l'arrêt querellé, que la question du délai de plainte a été abordée par la cour cantonale alors même qu'elle ne l'avait été ni par le ministère public ni par la recourante au préalable. Néanmoins, la recourante ne saurait être suivie lorsqu'elle considère que la motivation juridique adoptée par la cour cantonale était totalement inattendue. En effet, alors que, dans sa plainte du 8 octobre 2021, elle avait laissé la qualification juridique des faits reprochés à l'autorité compétente, la recourante a, dans le cadre du recours cantonal, considéré que ceux-ci devaient notamment être analysés sous l'angle de la LCD. Or, le dépôt d'une plainte, laquelle est expressément mentionnée à l'art. 23 LCD (cf. infra consid. 3.1), constitue l'exigence préalable à la poursuite de telles infractions. La cour cantonale s'est dès lors fondée sur cette exigence, pour conduire son raisonnement juridique à l'aune de l'art. 31 CP, disposition légale dont la prise en compte pouvait donc être raisonnablement prévue par la recourante. Celle-ci devait dès lors supputer la pertinence de la question du délai de plainte. La cour cantonale n'avait donc pas à interpeller les parties sur cette question et n'a donc pas violé le droit d'être entendu de la recourante. A cet égard, la critique de celle-ci quant au fait que cette question n'aurait pas été instruite ne lui est d'aucun secours, puisque la cour cantonale s'est fondée sur les pièces produites à l'appui de la plainte pour statuer sur le délai de trois mois. Mal fondé, le grief doit partant être rejeté.  
 
3.  
La recourante se plaint d'une violation de l'art. 31 CP en lien avec les art. 3 al. 1 let. b, d, e, f et i LCD. 
 
3.1. Selon l'art. 31 CP, le droit de porter plainte se prescrit par trois mois. Le délai court du jour où l'ayant droit a connu l'auteur de l'infraction.  
Le point de départ du délai est ainsi la connaissance de l'auteur et, bien entendu, de l'infraction. La connaissance par l'ayant droit doit être sûre et certaine, de sorte qu'il puisse considérer qu'une procédure dirigée contre l'auteur aura de bonnes chances de succès (ATF 142 IV 129 consid. 4.3 p. 135; 126 IV 131 consid. 2a p. 132; arrêt 6B_1029/2020 du 5 octobre 2021 consid. 3.1.1). Il n'est par contre pas nécessaire que l'ayant droit ait connaissance de la qualification juridique des faits (arrêt 6B_1029/2020 du 5 octobre 2021 consid. 3.1.1 et les références citées). 
L'art. 23 al. 1 LCD prévoit que quiconque, intentionnellement, se rend coupable de concurrence déloyale au sens des art. 3, 4, 5 ou 6 est, sur plainte, puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire. 
L'alinéa 2 de cette disposition précise que seul peut porter plainte celui qui a qualité pour intenter une action civile au sens des art. 9 et 10 LCD. En particulier, selon l'art. 10 al. 1 LCD, les actions prévues à l'art. 9 LCD peuvent aussi être intentées par les clients dont les intérêts économiques sont menacés ou lésés par un acte de concurrence déloyale. En d'autres termes, les clients, soit les personnes physiques ou morales qui se trouvent à la fin de la chaîne, à l'instar du consommateur final, menacés ou lésés dans leurs propres intérêts économiques ont la qualité pour agir contre un comportement déloyal (cf. ANNE-CHRISTINE FORNAGE, in Commentaire romand, Loi contre la concurrence déloyale, 2017, n° 4 ad art. 10 LCD). 
 
3.2. La recourante considère que les faits reprochés à l'intimée perdurerait au jour du présent recours, de sorte que les infractions pour lesquelles elle avait déposé plainte seraient constitutives d'un délit continu, si bien que la plainte pénale serait déposée dans le délai légal. Elle allègue à ce titre que la société se ferait passer pour une étude d'avocats et pour une assurance de protection juridique non autorisée par la FINMA, et qu'elle promettrait des services de qualité, ainsi qu'une grande réactivité, alors qu'elle avait été incapable de prendre en charge une annonce d'appel. Le site internet de la société lui donnerait notamment l'apparence d'une étude d'avocats. Les divers témoignages contenus dans celui-ci seraient pour certains factices, pour d'autres fallacieux. Elle produit à cet égard plusieurs pièces en se fondant sur l'art. 99 al. 1 LTF, vu l'impossibilité de les présenter en procédure cantonale compte tenu de la violation de son droit d'être entendue.  
Contrairement à ce que soutient la recourante, les faits nouveaux sur lesquels se fonde son grief sont irrecevables en procédure fédérale, puisqu'elle devait s'attendre à la motivation juridique adoptée par la cour cantonale (cf. art. 99 al. 1 LTF; GRÉGORY BOVEY, in Commentaire de la LTF, 3 e éd. 2022, n° 33 ad art. 99 LTF) dont il a été démontré qu'elle ne violait pas son droit d'être entendue.  
En l'espèce, la recourante se limite à alléguer que la situation perdurerait à ce jour. Ce faisant, elle n'expose pas en quoi les agissements dénoncés se seraient poursuivis à son égard au-delà du 20 mai 2021. Or, il ressort de l'arrêt querellé qu'à cette date, la recourante avait demandé à la société le remboursement de sa cotisation, faisant part de son mécontentement dans la prise en charge de son cas, se plaignant de " publicité mensongère " et informant le directeur de la société de son intention de déposer plainte pénale. Comme l'a retenu à bon droit la cour cantonale, les actes reprochés par la recourante à la société se sont donc achevés au plus tard à cette date. C'est à partir de ce moment que la recourante a eu connaissance, sinon d'une qualification juridique spécifique, du moins de ce que des infractions auraient été susceptibles d'avoir été commises à son détriment par la société, faisant ainsi partir le délai de trois mois prévu à l'art. 31 CP. Il n'y a ainsi pas lieu d'examiner la question d'un éventuel délit continu qui se serait cristallisé par des agissements de la société postérieurs au 20 mai 2021, pour lesquels la recourante n'aurait plus qualité pour porter plainte, ses propres intérêts économiques n'étant plus ni menacés ni lésés dès cette date (cf. art. 10 al. 1 et 23 al. 1 LCD). C'est dès lors sans violer le droit fédéral que la cour cantonale a constaté que la plainte du 8 octobre 2021 à l'encontre de la société pour des faits de concurrence déloyale était tardive. Mal fondé, le grief doit partant être rejeté.  
 
4.  
Au vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté. Comme il était dénué de chances de succès, la demande d'assistance judiciaire doit être rejetée (art. 64 al. 1 LTF). La recourante, qui succombe, supportera les frais judiciaires, dont le montant sera fixé en tenant compte de sa situation financière qui n'apparaît pas favorable (art. 65 al. 2 et 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
La demande d'assistance judiciaire est rejetée. 
 
3.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'200 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale de recours. 
 
 
Lausanne, le 30 novembre 2022 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Juge présidant : Denys 
 
Le Greffier : Rosselet