1C_142/2022 07.06.2023
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1C_142/2022  
 
 
Arrêt du 7 juin 2023  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Kneubühler, Président, 
Chaix et Haag. 
Greffière : Mme Nasel. 
 
Participants à la procédure 
Commune de Jouxtens-Mézery, 1008 Jouxtens-Mézery, représentée par Me Benoît Bovay, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
1. A.________, 
2. B.________, 
3. C.________, 
4. D.________, 
5. E.________, 
6. F.________, 
7. G.________, 
8. H.________, 
9. I.________, 
10. J.________, 
11. K.________, 
tous représentés par Me Daniel Guignard, avocat, 
intimés, 
 
Département des institutions, du territoire et des sports du canton de Vaud, place du Château 1, 1014 Lausanne, représenté par la Direction générale du territoire et du logement du canton de Vaud, avenue de l'Université 5, 1014 Lausanne. 
 
Objet 
Plan d'affectation; prolongation de la durée d'une zone réservée, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de droit administratif 
et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud 
du 28 janvier 2022 (AC.2021.0172). 
 
 
Faits :  
 
A.  
A.________, B.________, C.________, D.________, E.________, F.________, G.________, H.________, I.________, J.________ et K.________ (l'hoirie A.________) sont propriétaires en indivision sur le territoire de la commune de Jouxtens-Mézery (la commune) des parcelles n os 977 à 1004. Ces biens-fonds, figurant dans le secteur "A Grandchamp", sont sis en zone de villa II selon le règlement sur l'aménagement et les constructions de la commune (le règlement) dans sa version approuvée par l'autorité compétente le 29 juin 2007.  
 
B.  
Par décision du 4 février 2014, le Conseil communal de Jouxtens-Mézery (le conseil communal) a adopté la zone réservée "A Grandchamp" comprenant les 28 parcelles précitées; il a également levé l'opposition formée par l'hoirie A.________ dans le cadre de l'enquête publique. 
Le 4 avril 2014, la mise en place de cette zone réservée a fait l'objet d'une décision d'approbation préalable du Département cantonal du territoire et de l'environnement (DTE). 
Ces décisions ont été maintenues par la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud (Tribunal cantonal ou autorité précédente) dans son arrêt du 26 avril 2016, lequel a été confirmé par le Tribunal fédéral le 21 avril 2017 dans la cause 1C_241/2016. 
Le 25 août 2016, le Département cantonal de l'environnement et de la sécurité (DES) a mis en vigueur la modification du plan général d'affectation de la commune relatif à la zone "A Grandchamp". 
 
C.  
Le 2 février 2021, le conseil communal a adopté le préavis municipal n o 1/2021 relatif à la prolongation de la zone réservée "A Grandchamp" pour trois ans, soit jusqu'au 25 août 2024; ladite zone, entrée en vigueur le 25 août 2016, arrivait à échéance le 26 août 2021. Cette prolongation a été approuvée le 23 avril 2021 par le Département cantonal des institutions et du territoire (DIT).  
Par arrêt du 28 janvier 2022, le Tribunal cantonal a admis le recours formé par l'hoirie A.________ contre les décisions précitées, qu'il a annulées. En substance, il a considéré que le point de départ de la zone réservée était le 4 avril 2014, soit la date de l'approbation préalable de la zone réservée par l'autorité cantonale compétente; il en a conclu que le délai de cinq ans était échu lorsque la prolongation de la durée de la zone réservée "A Grandchamp" a été soumise à l'enquête publique du 16 octobre au 16 novembre 2020. 
 
D.  
Par acte du 2 mars 2022, la commune forme un recours en matière de droit public auprès du Tribunal fédéral, par lequel elle conclut à la réforme de l'arrêt entrepris en ce sens que les décisions du conseil communal du 2 février 2021 et du DIT du 23 avril 2021 sont confirmées. Subsidiairement, elle demande l'annulation de l'arrêt entrepris et le renvoi du dossier au Tribunal cantonal pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Elle sollicite par ailleurs l'effet suspensif, accordé par ordonnance du 22 mars 2022. 
Le Tribunal cantonal, qui renonce à se déterminer sur le recours, se réfère à l'arrêt attaqué. La Direction générale du territoire et du logement du canton de Vaud (DGTL), représentant le DIT, conclut à l'admission du recours. Les intimés concluent à l'irrecevabilité de celui-ci et à l'allocation d'une indemnité de dépens d'un montant ne devant pas être inférieur à 4'000 fr., à mettre à la charge de la recourante, à l'instar des frais judiciaires; ils concluent subsidiairement au rejet du recours. L'Office fédéral du développement territorial (ARE) s'en remet à justice quant à l'issue à donner à cette affaire, précisant que la question du dies a quo du délai de cinq ans applicable aux zones réservées relève avant tout du droit cantonal. La DGTL confirme ses conclusions tendant à l'admission du recours; les intimés s'en tiennent aux moyens invoqués dans leur réponse. Dans ses dernières déterminations du 24 octobre 2022, la recourante persiste dans ses arguments, la DGTL confirmant à nouveau ses conclusions le 18 novembre 2022.  
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
 
1.1. Dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) prise en dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 lit. d LTF) dans le domaine du droit public des constructions (art. 82 lit. a LTF), le recours est en principe recevable comme recours en matière de droit public selon les art. 82 ss LTF, aucune des exceptions prévues à l'art. 83 LTF n'étant réalisée.  
 
1.2. Au stade de la recevabilité, la recourante se prévaut de l'autonomie dont elle bénéficie en matière d'aménagement du territoire et en droit des constructions, reconnue sur le plan cantonal (cf. art. 139 al. 1 let. d Cst-VD [BLV 101.01]; cf. ATF 142 I 26 consid. 3.3; arrêts 1C_212/2022 du 30 mars 2023 consid. 2; 1C_710/2021 du 5 octobre 2022 consid. 1.1), si bien qu'elle est sous cet angle recevable à agir (art. 89 al. 2 let. c LTF).  
 
1.3. Les intimés font valoir que les parcelles n os 977 à 1004 sont désormais affectées à la zone agricole protégée au sens de l'art. 16 LAT; la recourante n'aurait dès lors plus d'intérêt actuel à requérir devant la Cour de céans la confirmation des décisions du conseil communal et du DIT approuvant la prolongation de la durée de la zone réservée. A l'appui de leur argumentation, les intimés allèguent des faits nouveaux, fondés sur des pièces antérieures à l'arrêt entrepris, qui ne résultent pas du dossier cantonal. Ils font valoir que ces éléments seraient déterminants pour la recevabilité du recours au Tribunal fédéral de sorte qu'ils seraient admissibles (cf. ATF 148 V 174 consid. 2.2; 143 V 19 consid. 1.2). Les intimés contestent également la réalisation des conditions pour entrer en matière en l'absence d'un intérêt actuel (cf. ATF 147 I 478 consid. 2.2; 146 II 335 consid. 1.3). Vu l'issue du litige, ces questions peuvent toutefois demeurer indécises, étant relevé que les autres conditions de recevabilité sont en l'espèce réunies.  
 
2.  
La recourante fait valoir que le Tribunal cantonal aurait violé son autonomie communale (art. 50 Cst.) ainsi que l'art. 26 al. 3 LAT; il aurait en outre fait une application arbitraire de l'art. 3 du règlement de la zone réservée "A Grandchamp" (règlement de la zone réservée) ainsi que des art. 46, 61, 61a, 77 et 79 de la loi vaudoise du 4 décembre 1985 sur l'aménagement du territoire et les constructions, dans sa version en vigueur jusqu'au 31 août 2018 (aLATC; BLV 700.11). 
 
2.1. Le Tribunal fédéral revoit librement l'interprétation et l'application du droit fédéral et du droit constitutionnel cantonal (art. 95 LTF). Il examine en revanche sous l'angle restreint de l'arbitraire l'interprétation et l'application des autres règles du droit cantonal ou communal (ATF 141 I 36 consid. 5.4; 138 V 67 consid. 2.2; 134 II 349 consid. 3). Une décision est arbitraire lorsqu'elle viole gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou lorsqu'elle contredit d'une manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité. Le Tribunal fédéral n'a pas à déterminer quelle est l'interprétation correcte que l'autorité cantonale aurait dû donner des dispositions applicables; il doit uniquement examiner si l'interprétation qui a été faite est défendable. Il ne s'écarte de la solution retenue que si celle-ci apparaît insoutenable ou en contradiction manifeste avec la situation effective, ou encore si elle a été adoptée sans motifs objectifs et en violation d'un droit certain. En outre, il ne suffit pas que les motifs de la décision critiquée soient insoutenables, encore faut-il que celle-ci soit arbitraire dans son résultat. Si l'application de la loi défendue par l'autorité cantonale ne se révèle pas déraisonnable ou manifestement contraire au sens et au but de la disposition ou de la législation en cause, cette interprétation sera confirmée, même si une autre solution - éventuellement plus judicieuse - paraît possible (ATF 145 I 108 consid. 4.4.1; 144 IV 136 consid. 5.8; 144 I 170 consid. 7.3; arrêt 1C_359/2022 du 20 avril 2023 consid. 2.2).  
 
2.2.  
 
2.2.1. Selon l'art. 27 LAT, s'il n'existe pas de plan d'affectation ou que l'adaptation d'un tel plan s'impose, l'autorité compétente peut prévoir des zones réservées dans des territoires exactement délimités. A l'intérieur de ces zones, rien ne doit être entrepris qui puisse entraver l'établissement du plan d'affectation (al. 1). Une zone réservée ne peut être prévue que pour cinq ans au plus; le droit cantonal peut prolonger ce délai (al. 2).  
Dans le canton de Vaud, l'art. 46 aLATC - dans sa teneur jusqu'au 31 août 2018 - prévoit que la commune ou l'Etat peuvent établir une zone réservée, à titre provisoire, pour une durée de cinq ans pouvant être prolongée de trois ans au maximum lorsque la sauvegarde des buts et des principes régissant l'aménagement du territoire l'exige (al. 1), la procédure étant réglée au chapitre IV ci-dessous (al. 2). Le chapitre IV concernait la procédure d'établissement des plans d'affectation et des plans de quartier de compétence municipale (art. 56 ss aLATC). 
L'art. 46 LATC, dans sa nouvelle version au 1er septembre 2018 (laquelle n'a pas entraîné de modification de fond et dont le texte est identique à l'art. 46 LATC dans sa teneur actuelle au 1er octobre 2020), dispose que les communes ou le département peuvent établir des zones réservées selon l'art. 27 LAT. Ces zones interdisent ou limitent la constructibilité de terrains pendant une période maximale de cinq ans, pouvant être prolongée de trois ans au maximum (al. 1). La procédure d'approbation est celle des plans d'affectation (al. 2). 
 
2.2.2. L'établissement d'une zone réservée permet en particulier de garantir aux autorités chargées de l'aménagement du territoire la liberté de planifier et de décider, et d'éviter que des projets de construction viennent entraver cette liberté (arrêts 1C_129/2022 du 18 avril 2023 consid. 4.1.1; 1C_204/2022 du 21 mars 2023 consid. 3.1).  
Une zone réservée au sens de l'art. 46 LATC ou au sens de l'art. 27 LAT auquel il renvoie, est une mesure conservatoire. Elle équivaut à un plan d'affectation et entraîne des restrictions à la propriété (ATF 113 Ia 362 consid. 2; arrêt 1C_260/2019 du 18 octobre 2019 consid. 3.1.3); elle permet notamment d'interdire temporairement toute construction. Le principe de la proportionnalité exige cependant que cette mesure corresponde au périmètre concerné par l'obligation de planifier (arrêts 1C_623/2021 du 24 novembre 2022 consid. 4.1; 1C_518/2019 du 8 juillet 2020 consid. 5.1). Une telle mesure doit en outre être limitée dans le temps (art. 27 al. 2 LAT); c'est ce que prescrit l'art. 46 al. 1 aLATC (ainsi que l'actuel art. 46 al. 1 LATC). 
La LATC prévoit d'autres mesures conservatoires aux art. 47 et 49 LATC, dispositions qui ont remplacé au 1 er septembre 2018, les art. 77 et 79 aLATC.  
 
2.2.3. Comme déjà évoqué, la procédure d'approbation d'une zone réservée est celle des plans d'affectation (art. 46 al. 2 LATC et 46 al. 2 aLATC). Au niveau fédéral, l'art. 26 LAT prévoit qu'une autorité cantonale approuve les plans d'affectation et leurs adaptations (al. 1) et examine s'ils sont conformes aux plans directeurs cantonaux approuvés par le Conseil fédéral (al. 2). L'approbation des plans d'affectation par l'autorité cantonale leur confère force obligatoire (al. 3).  
Sur le plan cantonal, la procédure d'établissement et d'approbation des plans d'affectation est actuellement régie par les art. 34 ss LATC. L'art. 42 LATC prévoit l'adoption des plans d'affectation par le conseil communal. Selon l'art. 43 LATC, ceux-ci sont ensuite approuvés par le département cantonal compétent qui notifie les décisions cantonale et communale aux opposants éventuels (al. 1 et 2). Ces décisions sont susceptibles d'un recours au Tribunal cantonal avec libre pouvoir d'examen (al. 2). Le service constate ensuite l'entrée en vigueur du plan (al. 3), constatation qui, selon l'arrêt entrepris (p. 8), n'a pas de portée constitutive. 
En l'espèce, la zone réservée "A Grandchamp" a été adoptée selon la procédure qui prévalait avant la modification législative entrée en vigueur le 1er septembre 2018, conformément aux art. 56ss aLATC. Cette procédure prévoyait une procédure d'approbation en deux temps devant le département cantonal. Ainsi, sous la note marginale "Approbation et recours au Tribunal cantonal", l'art. 61 aLATC avait la teneur suivante: 
 
1 Le département décide préalablement s'il peut approuver le plan et le règlement, l'approuver partiellement ou l'écarter. Son pouvoir d'examen est limité à la légalité. 
2 La décision du département est notifiée par écrit à la commune, aux opposants et aux propriétaires lésés. Elle est susceptible d'un recours au Tribunal cantonal. Les articles 31 ss LJPA sont au surplus applicables. 
3 Le département se prononce préalablement dans un délai de trois mois dès la communication du dossier complet. 
4... 
Quant à l'art. 61a aLATC, intitulé "Mise en vigueur", il prévoyait ce qui suit: 
 
1 Le département se prononce définitivement sur le plan et le règlement si aucun recours n'a été déposé. Il les met en vigueur et abroge simultanément les plans et les règlements antérieurs dans la mesure où ils leur sont contraires. Cette décision n'est pas susceptible d'un recours. 
2 Le département peut mettre en vigueur la partie du plan et du règlement non concernée par les recours dans la mesure où l'effet suspensif n'a pas été accordé sur tout le plan et le règlement. 
3 Il met en vigueur la partie du plan concernée par les recours après avoir pris connaissance des arrêts du Tribunal cantonal. 
S'agissant enfin de l'art. 3 du règlement de la zone réservée, il dispose que la zone réservée déploie ses effets dès sa mise en vigueur par le Département compétent et abroge provisoirement toutes les dispositions antérieures, notamment celles des règlements communaux, qui lui sont contraires. 
 
2.3. En l'espèce, bien qu'elle se réfère aux art. 50 et 139 al. 1 let. d Cst-VD (BLV 101.01), la recourante se plaint en réalité uniquement d'une violation de l'art. 26 al. 3 LAT et d'une interprétation arbitraire de l'art. 3 du règlement de la zone réservée ainsi que des art. 46, 61, 61a, 77 et 79 aLATC. On se contentera dès lors d'examiner ci-dessous si l'autorité précédente a enfreint l'art. 26 al. 3 LAT, respectivement si elle est tombée dans l'arbitraire en interprétant, comme elle l'a fait, les dispositions communale et cantonales précitées.  
 
2.4.  
 
2.4.1. L'arrêt entrepris, qui se réfère à la jurisprudence cantonale, rappelle que la zone réservée, même si elle est assimilée à un plan d'affectation, constitue une mesure conservatoire interdisant ou limitant la constructibilité de terrains pendant une certaine période. Il relève que, d'après cette jurisprudence, cette mesure de "blocage" constitue, à l'instar des mesures conservatoires des art. 47 et 49 LATC (art. 77 et 79 aLATC), une restriction à la garantie de la propriété, devant respecter les principes de la légalité, de l'intérêt public et de la proportionnalité. Il rappelle que le Tribunal cantonal s'est déjà prononcé sur la nature de la procédure d'adoption en deux temps dans le cadre d'affaires précédentes concernant des plans d'affectation; il avait alors retenu que l'approbation définitive de l'art. 61a aLATC était une simple formalité, le département cantonal ne pouvant pas, dans ce cadre, réexaminer matériellement sa décision d'approbation préalable. Dans l'arrêt attaqué, le Tribunal cantonal précise encore que le plan d'affectation définit les usages qui pourraient être faits de diverses parcelles, alors que la zone réservée empêche toute utilisation des parcelles qu'elle concerne; il en déduit que sa jurisprudence en lien avec la procédure d'approbation préalable à l'approbation définitive du plan d'affectation n'est pas directement applicable à la problématique de la zone réservée. Se fondant sur ces éléments, et tenant compte en particulier du principe de la proportionnalité, en lien avec la durée de la zone réservée, l'autorité précédente en conclut qu'il se justifie de considérer la date de l'approbation préalable comme date de départ du délai de cinq ans fixé par la LAT et la LATC.  
 
2.4.2. Selon la recourante, retenir que le délai de cinq ans prévu par l'art. 46 aLATC court dès la décision préalable d'approbation de l'art. 61 aLATC reviendrait à considérer - en violation de l'art. 26 al. 3 LAT - que la zone réservée déploierait ses effets avant que la décision d'approbation définitive de mise en vigueur au sens de l'art. 61a aLATC n'intervienne. Elle soutient que dès lors que le droit vaudois assimile la zone réservée aux plans d'affectation et la soumet à la même procédure, la zone réservée ne deviendrait juridiquement efficace qu'après la décision d'approbation définitive, un effet anticipé positif étant interdit.  
 
2.4.3. Il est vrai que l'effet anticipé positif - à savoir l'application du droit futur qui n'est pas encore en vigueur en lieu et place du droit actuel - n'est en principe pas admissible (cf. ATF 136 I 142 consid. 3.2; arrêt 1C_355/2021 du 17 mars 2022 consid. 3). Il n'est toutefois pas question en l'espèce d'un effet anticipé positif puisque la zone réservée en question a pour effet de surseoir à l'application du droit encore applicable en vue de l'entrée en vigueur du nouveau droit (cf. ATF 136 I 142 consid. 3.2; arrêts 1C_204/2022 du 21 mars 2023 consid. 3.1; 1C_156/2019 du 26 novembre 2019 consid. 2.2; 1C_260/2019 du 18 octobre 2019 consid. 3.1.3).  
Cela étant, la zone réservée, qui a pour but de bloquer toute construction future, constitue une mesure de sécurisation préventive d'une durée limitée, qui ne peut atteindre son but que si elle prend effet immédiatement (arrêt 1C_518/2019 du 8 juillet 2020 consid. 4.3). On ne saurait dès lors reprocher au Tribunal cantonal d'être tombé dans l'arbitraire en retenant que la zone réservée se distinguait en cela du plan d'affectation. 
La recourante invoque certes des motifs défendables afin de démontrer que la zone réservée ne pourrait déployer ses effets qu'à partir de la décision d'approbation définitive et de mise en vigueur de l'autorité cantonale au sens de l'art. 61a aLATC. Il n'appartient toutefois pas au Tribunal fédéral de contrôler le bien-fondé de l'interprétation de la recourante, car c'est uniquement la solution du Tribunal cantonal qui doit être revue, et cela sous l'angle de l'arbitraire. Si l'application du droit cantonal par l'autorité précédente ne s'avère pas déraisonnable ou manifestement contraire au sens et au but de la disposition ou de la réglementation en cause, cette interprétation doit être confirmée, même si une autre solution - éventuellement plus judicieuse - paraît possible (cf. ATF 145 I 108 consid. 4.4.1). 
Or, il apparaît en l'espèce que la façon dont le Tribunal cantonal interprète l'art. 46 aLATC, en lien avec les autres dispositions cantonales, en particulier les art. 61 aLATC et 61a aLATC, poursuit l'objectif selon lequel la zone réservée doit être limitée dans le temps (cf. art. 27 al. 2 LAT); elle vise aussi le but de sécurisation préventive de la zone réservée. Les motifs qu'il avance sont en tous les cas soutenables. Quoi qu'en dise la recourante, si l'on suit l'interprétation qu'elle propose, les éventuels recours déposés à l'encontre de l'approbation préalable de la zone réservée auront pour effet de prolonger de facto la durée de celle-ci, ce que relève l'autorité précédente. Une telle interprétation aurait en outre pour conséquence de pénaliser les propriétaires qui décideraient de faire usage de leur droit de recours. Comme on l'a dit (cf. supra consid. 2.2.2), la mesure en cause est une restriction à la garantie de la propriété; elle ne saurait dès lors être prolongée pour une autre raison que celle d'être au service de l'adoption de la nouvelle réglementation (arrêts 1C_440/2019 du 7 janvier 2020 consid. 4.3.2; 1P.365/2006 du 5 octobre 2006 consid. 3.4). Dans ce contexte, considérer que la zone réservée déploie des effets à l'égard de futures constructions une fois qu'elle a été approuvée préalablement par l'autorité compétente, nonobstant un éventuel recours déposé à son encontre, soit dès avant sa mise en vigueur au sens de l'art. 61a aLATC, n'apparaît ni insoutenable ni contrevenir à l'art. 26 al. 3 LAT. Cette solution prend en considération l'objectif de préserver - sans délai - le statut actuel des parcelles, tout en limitant la durée de la zone réservée pour tenir compte du principe de proportionnalité; elle apparaît pour le surplus conforme à la jurisprudence cantonale en lien avec l'art. 61a aLATC, selon laquelle l'approbation définitive, respectivement la mise en vigueur de la zone réservée n'est en réalité qu'une simple formalité.  
 
2.5. En fin de compte, le Tribunal cantonal n'a pas versé dans l'arbitraire en considérant que le dies a quo du délai de cinq ans de l'art. 46 aLATC avait débuté dès l'approbation préalable de la zone réservée par l'autorité cantonale compétente en application de l'art. 61 aLATC, de sorte que le délai de cinq ans était échu lorsque la prolongation de la zone réservée a été soumise à l'enquête publique du 16 octobre au 16 novembre 2020.  
 
3.  
Sur le vu de ce qui précède, le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. Il n'y a en l'espèce pas lieu de percevoir de frais judiciaires (cf. art. 66 al. 4 LTF). Les intimés, qui ont procédé avec l'assistance d'un avocat, ont en revanche droit à des dépens, à la charge de la commune (art. 68 al. 2 LTF). Les circonstances de l'espèce ne commandent pas de leur allouer des dépens d'un montant supérieur à 3'000 fr. (cf. art. 6 du règlement du 31 mars 2006 sur les dépens alloués à la partie adverse et sur l'indemnité pour la représentation d'office dans les causes portées devant le Tribunal fédéral [RS 173.110.210.3]). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
3.  
Une indemnité de 3'000 fr. est allouée aux intimés à titre de dépens, à la charge de la Commune de Jouxtens-Mézery. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties, à la Direction générale du territoire et du logement du canton de Vaud, au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public, et à l'Office fédéral du développement territorial. 
 
 
Lausanne, le 7 juin 2023 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Kneubühler 
 
La Greffière : Nasel